Crise financière de l'immobilier spéculatif américain aux Bourses mondiales. Et après ?14/09/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/09/une2041.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Crise financière de l'immobilier spéculatif américain aux Bourses mondiales. Et après ?

On n'en est plus aux propos rassurants du début de l'été, quand on nous assurait que les premiers craquements du marché des crédits immobiliers américains n'auraient d'autres conséquences que dans ce secteur et dans ce pays.

" L'économie américaine fait trembler les marchés ", a titré en Une le quotidien économique Les Échos du 10 septembre. Depuis plusieurs semaines, en effet, les Bourses du monde entier dévissent : -12 % de la mi-juillet à la mi-août, et ça continue. Et cela alors que les banques centrales, appelées à la rescousse de la finance mondiale, ont déjà mis à sa disposition des centaines de milliards de dollars et d'euros.

Emboîtant le pas à la Fed (banque centrale américaine), la Banque centrale européenne (BCE) a injecté 300 milliards d'euros de liquidités dans le marché interbancaire entre le 9 et le 28 août. Ces jours-ci, la Fed a rajouté 32 milliards de dollars pour aider ses établissements financiers en difficulté et la BCE 42 milliards d'euros dans le même but.

Les banques centrales ont ainsi déjà déversé des centaines de milliards pour sauver la mise à des spéculateurs du monde entier, dont de très grandes banques et multinationales, parmi lesquelles, directement ou par le biais de filiales, BNP Paribas, AXA, pour ne citer que certaines de leurs représentantes françaises.

Quand tout le système spécule

Avant d'éclater cet été, la " bulle " immobilière outre-Atlantique a fait les beaux jours d'une multitude de sociétés de construction, de courtage, de revente, de fonds d'investissements financiers et bien sûr de banques qui se précipitaient, des États-Unis comme du monde entier, sur l'aubaine : la perspective de rapides profits, les prix immobiliers s'envolant toujours plus haut.

Pour alimenter ce marché spéculatif, les ménages américains étaient incités à s'endetter pour acheter leur logement, y compris les plus modestes. Bien sûr, les banques n'ignoraient pas que des emprunteurs ne pourraient pas les rembourser s'ils perdaient leur emploi ou si les taux de crédit s'envolaient. Mais, tant que les prix de l'immobilier grimpaient, les emprunteurs pouvaient revendre leurs maisons, la banque y trouvant son profit, comme d'ailleurs une foule d'intermédiaires en tout genre.

Pour se prémunir contre les aléas des prêts " subprime " (accordés à des emprunteurs peu solvables, donc considérés comme les plus risqués), les banques avaient " titrisé " ces crédits. C'est-à-dire qu'elles les avaient transformés en produits financiers achetables et vendables sur le marché.

Les banques avaient commencé par spéculer sur des maisons qui, parfois, n'étaient pas encore construites. Elles continuèrent, ainsi que des fonds d'investissement dits " dynamiques " (qui étaient souvent leurs filiales), à le faire sur des bouts de papier, ou plutôt des titres informatisés, que s'achetaient et se revendaient les établissements financiers et les grandes entreprises du monde entier.

Au second trimestre de cette année, 600 000 emprunteurs " subprime " n'arrivaient déjà plus à rembourser leur crédit. C'est alors qu'une banque d'investissement dut fermer deux de ses fonds gavés de ces " produits " financiers. Puis ce fut le tour d'une grosse société de courtage immobilier, qui se plaça sous la protection de la loi américaine sur les faillites. La bulle spéculative se dégonflant encore plus vite qu'elle n'avait pris forme, la BNP Paribas, comme bien d'autres, annonçait, le 9 août, qu'elle fermait trois de ses fonds " dynamiques "... une semaine après que son président eut prétendu qu'ils n'avaient pas de problèmes !

Une myriade de sociétés, financières ou non, petites ou très grandes, avaient pris part à cette spéculation ; c'est l'ensemble du système financier mondial qui était touché. Des centaines de milliards s'étant évanouis en fumée, les banques auraient plus de difficulté à accorder des crédits. Ceux-ci allaient devenir plus chers, avec des répercussions sur l'économie réelle, notamment sur les industries qui, ayant plus de difficulté à investir, chercheraient encore plus à maintenir leurs profits en licenciant.

Après une pause de quelques jours, au coeur de l'été, où chefs d'État et banquiers internationaux avaient cherché à rassurer leur monde sur l'air de " Tout va très bien, Madame la marquise ", la crise est repartie.

" Ce ne sera pas indolore... "

" La menace d'une récession se renforce ", a titré récemment un quotidien économique. Et des institutions du monde capitaliste, tel le FMI le 10 septembre, annoncent " un impact négatif modeste sur la croissance ", ajoutant : " Cela ne veut pas dire que ce sera indolore. "

Indolore, ce ne l'est certainement pas pour des centaines de milliers de familles modestes d'outre-Atlantique que la flambée des taux de crédit et la faiblesse de leurs revenus ont déjà contraintes de vendre, à perte, leur logement. Et on estime à trois millions le nombre de celles sur lesquelles pèse cette menace.

Indolore, ce ne l'est pas non plus pour les travailleurs d'outre-Atlantique, les premiers touchés : conséquence directe de cette crise, 4 000 emplois ont disparu aux États-Unis en août. Des dizaines de milliers de suppressions d'emplois sont d'ores et déjà annoncées, tandis que des centaines de milliers d'autres menacent dans les secteurs de la banque, de l'immobilier et de la construction et que, pour la première fois depuis quatre ans, les autorités américaines enregistrent un recul de l'emploi.

Cela ne s'arrêtera sans doute pas là, même si nul ne sait jusqu'où peut aller cette récession qui s'engage. Et certainement pas les " experts " économiques qui, pour la plupart, n'ont pas vu venir cette crise et, en tout cas, auraient été bien incapables de la conjurer tant le fonctionnement du système capitaliste, encore plus qu'aux prévisions, échappe à tout contrôle. Car ce qui le guide, c'est la recherche du profit à tout prix.

L'irresponsabilité, la dangerosité pour l'humanité des tenants du système capitaliste, on en a une nouvelle illustration avec ce qui n'est déjà plus l'éclatement de la bulle spéculative immobilière aux États-Unis et qui pourrait déboucher sur une récession mondiale aux conséquences aussi dramatiques qu'imprévisibles.

Partager