Bicentenaire de la naissance de Giuseppe Garibaldi : Le héros de l'unité italienne et son mythe14/09/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/09/une2041.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Divers

Bicentenaire de la naissance de Giuseppe Garibaldi : Le héros de l'unité italienne et son mythe

L'article suivant, extrait du journal de nos camarades italiens, L'Internazionale (n° 72 de septembre 2007), rappelle comment Garibaldi aida le roi Victor-Emmanuel II de Savoie à réaliser l'Unité italienne, contre les troupes des Bourbons de Naples qui contrôlaient le sud de l'Italie et la Sicile... mais aussi contre les paysans siciliens révoltés.

Le 4 juillet dernier le Parlement italien a célébré le bicentenaire de la naissance de Giuseppe Garibaldi en illustrant la vie, la pensée et l'oeuvre de ce " père de la patrie. "

Garibaldi nous est présenté, dès les bancs de l'école, comme l'homme d'action qui, avec Mazzini, le penseur, et avec Cavour, l'homme d'État et le diplomate, sut canaliser les meilleures énergies d'une génération pour réaliser l'unité du pays. Une sainte trinité qui aurait donc présidé à la genèse de la patrie.

D'origine petite-bourgeoise, fils d'un petit armateur et capitaine de petits navires de cabotage, Garibaldi devint lui-même, très jeune, commandant d'un bâtiment. Durant un voyage en mer Noire, il entra en contact avec des éléments mazziniens et adhéra à la Jeune Italie (le parti de Mazzini qui luttait pour l'instauration d'une république italienne contre la dynastie de Savoie régnant alors en Piémont et Sardaigne -NdT). Il prit part à la tentative infructueuse de renverser la dynastie et, menacé d'une condamnation à mort, prit le chemin de l'exil.

En Amérique du Sud il mena une vie aventureuse, prenant part à la tentative de sécession de la région du Rio Grande do Sul de l'empire du Brésil, puis à la lutte de l'Uruguay contre l'Argentine qui voulait s'annexer ce petit pays. C'est dans ce contexte que l'homme de mer fit pour la première fois la précieuse expérience des tactiques de combat sur terre. (...) Cette expérience se manifesta amplement en 1849 quand Garibaldi, revenu en Italie quand éclata la première guerre d'Indépendance, participa aux combats pour la défense de la République romaine.

Après la chute de celle-ci, il retourna aux États-Unis puis, revenu en Italie, il rompit avec l'intransigeance républicaine de Mazzini et se mit au service de la maison de Savoie. Ce fut " l'expédition des Mille " en Sicile (qui en réalité furent bien plus de mille grâce aux renforts en hommes et en armes envoyés de Turin à mesure que l'expédition progressait). Garibaldi sut conjuguer pour une période - la période initiale où il se trouvait encore en situation d'infériorité extrême - les exigences de la campagne militaire avec l'" exigence " des réquisitions auprès des paysans et des populations déshéritées.

Le 17 mai 1860, deux jours après la dure victoire de Calatifimi et alors que Palerme était encore solidement contrôlé par un puissant détachement de l'armée des Bourbons, il émit le décret d'Alcamo abolissant dans toute la Sicile l'impôt sur la mouture du grain et imposant d'autres mesures en faveur des paysans et des locataires de terres.

Ainsi, pour une brève période Garibaldi fit le choix de s'appuyer sur la révolte paysanne qui se développait dans toute l'île et de s'en servir pour vaincre les forces des Bourbons. Pour un court moment les paysans siciliens eurent en Garibaldi le chef de leur révolte de classe.

Mais en août, après la bataille de Milazzo qui amena la défaite définitive des Bourbons en Sicile, toute la bourgeoisie et la noblesse de l'île choisirent de devenir italiennes et unitaires (" il faut tout changer pour que tout reste pareil " affirme le prince Salina dans le roman Le Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa), sonnant l'heure du retour à l'ordre par la répression sans pitié de tous les actes " illégaux " des paysans. Garibaldi, exerçant " la dictature au nom du roi Victor-Emmanuel ", fut le responsable direct du rétablissement de cet ordre dans l'île. Son bras droit, Nino Bixio, appuyé par de nombreuses unités de carabiniers venues spécialement pour " normaliser " la situation, fut un des plus zélés exécutants de cette tâche.

Totalement disposé à " faire l'Italie ", le général Garibaldi était prêt à la faire contre quiconque, fût-ce les masses de paysans déshérités et en révolte qui, plus que combattre pour une " patrie " dont ils connaissaient à peine le nom et qui ne devait leur amener par la suite que la taxe sur le grain et le service militaire obligatoire, combattaient pour se libérer du joug de la noblesse et des propriétaires terriens.

Les années suivantes, après avoir " fait l'Italie ", la pensée de Garibaldi et sa politique souvent contradictoire continuèrent à exprimer l'idéologie des couches bourgeoises et petites-bourgeoises qui furent les protagonistes " de gauche " du Risorgimento (la " Renaissance ", nom donné au processus de l'Unité Italienne - NdT). Et cela malgré une très personnelle et totalement antimarxiste adhésion idéale à l'Association Internationale des Travailleurs et à l'idée utopique que les sociétés de secours mutuel (qui à l'époque commençaient à fleurir comme embryons d'associations ouvrières) pourraient résoudre les maux de l'exploitation.

Mais ce qu'a surtout produit Garibaldi, c'est peut-être le mythe de lui-même, un mythe qui s'est prolongé dans le temps et s'est diffusé au-delà de l'Italie. En visite à Londres en avril 1864, il fut accueilli en grande pompe par le gouvernement. Marx qualifia l'attitude de Garibaldi de " lamentable ". Mais le mythe d'un héros " sans tache et sans peur ", repris par tous les courants bourgeois et réformistes de la droite à la gauche, survit d'une certaine façon aujourd'hui.

Partager