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Chili : Par-delà sa mort, Pinochet revendique ses crimes

Pinochet, décédé le 10 décembre 2006, avait dans ses tiroirs une lettre destinée à être diffusée après sa mort. Sans surprise: l'ancien dictateur chilien y justifie le coup d'État du 11 septembre 1973 renversant le président socialiste Salvador Allende. Et du même coup il justifie la dictature imposée à la population chilienne pendant dix-sept ans. Pinochet se présente une fois de plus comme le sauveur, évitant au Chili la guerre civile.

Pinochet le dit tout net: «Je déclare en toute sincérité être fier de l'action énorme qu'il fallut effectuer pour empêcher que le marxisme-léninisme parvienne au pouvoir total et aussi pour que ma chère patrie soit une grande nation, comme le disait la devise qui inspira dès le début la Junte de gouvernement. De cela je ne douterai jamais sans vaciller d'une pensée.» Seul (léger) correctif:« En cas de répétition de l'expérience, ajoute-t-il, j'aurais néanmoins souhaité davantage de sagesse.»

Plus de 3000 morts et disparus (selon les chiffres officiels), près de 40000 torturés et un nombre d'exilés évalué à 200000, tel est le bilan des violences et des exactions perpétrés par les militaires à ses ordres, relayés par des commandos de tortionnaires et d'hommes de main. Ce serait un peu trop, semble dire Pinochet. Mais Pinochet n'a payé pour aucun de ses crimes. Depuis des années, bénéficiant à divers titres d'une immunité qu'il s'était octroyée et que ses successeurs ont respectée, puis couvert en tant que sénateur, et enfin protégé par les dirigeants d'autres pays, il avait réussi à ne jamais rendre de comptes. Et puis sa dernière phrase visait sans doute aussi à continuer de couvrir des militaires connus pour leurs responsabilités dans la dictature.

Seize ans après la fin du régime de Pinochet, nombre de responsables de la répression et bien des tortionnaires sont en liberté et exercent bien souvent des responsabilités au Chili. Mais souvenons-nous aussi qu'en France des hommes comme Papon n'ont, eux non plus, jamais payé pour leurs crimes.

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