Officines privées de placement : Pour profiter du chômage, pas pour le résoudre27/09/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/09/une1991.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Officines privées de placement : Pour profiter du chômage, pas pour le résoudre

Vendredi 8 septembre, les représentants du patronat et des centrales syndicales, qui siègent ensemble à l'Unedic, l'organisme qui centralise toutes les Assedic du pays, se sont réunis pour attribuer à des organismes privés la responsabilité du placement des demandeurs d'emploi, jusqu'à 100000 sur deux ans. Ces officines, dont certaines existent déjà, remplaceraient, contre paiement, l'ANPE, qui est, elle, une entreprise publique.

Les entreprises sélectionnées qui participeront à cette opération qui vise à faire croire que, pour combattre le chômage, il suffirait de savoir reclasser les chômeurs, se partageront un gâteau de 168millions d'euros sur deux ans, pris sur les cotisations des salariés.

L'opération, qui devrait débuter au 1ernovembre, est taillée sur mesure pour les entreprises qui vont récolter le marché. On leur confie le reclassement de nouveaux chômeurs indemnisés, inscrits depuis moins de deux mois à l'ANPE, volontaires pour être reclassés, qu'elles auront la tâche d'accompagner pendant six mois maximum. Or, plus de la moitié de cette catégorie de demandeurs d'emplois se reclassent habituellement par leurs propres moyens pendant cette période. De plus, chaque agent de l'entreprise privée de reclassement aura 40chômeurs à prendre en charge contre 130 pour les agents de l'ANPE. En clair ces entreprises seront payées pour ce qui, en temps normal, se fait sans l'aide de personne.

Mais le problème du chômage n'est pas de discuter du prétendu «professionnalisme» respectif de l'ANPE et des entreprises privées de placement. S'il y a aujourd'hui des millions de chômeurs, c'est à cause des centaines de milliers d'emplois supprimés chaque année dans l'industrie, les services, le commerce ou les services publics, par le patronat et les gouvernements. Car même quand on réduit les effectifs «en douceur», c'est-à-dire sans licenciement «sec», ce sont les jeunes qui arrivent sur le marché du travail et les autres travailleurs qui se voient privés d'emploi et se retrouvent au chômage.

Il y a 2,2 millions de chômeurs officiellement recensés, mais plus de quatre millions dans la réalité. On s'achemine vers le chiffre d'un million et demi de chômeurs qui, ayant épuisé leur droit à l'indemnisation, même minime, vont basculer dans le RMI. Des centaines de milliers d'autres, parce que vivant en couple par exemple, n'auront même pas droit au RMI et ne seront même plus recensés.

Pour donner du travail à ceux qui n'en ont pas, il faudrait commencer par interdire aux entreprises les plus riches et à toutes les filiales qu'elles contrôlent, de licencier en masse et de supprimer des emplois, simplement pour augmenter les dividendes versés à leurs actionnaires.

Et puis trouver et donner du travail, l'État le pourrait, s'il embauchait en masse, directement, tous les salariés nécessaires pour fournir les effectifs qui manquent dans l'éducation, la santé, ou encore pour réaliser la construction des millions de logements bon marché et de bonne qualité qui manquent dans tout le pays.

Face à cela, les entreprises privées de placement ont un fort goût de sérieux retour en arrière et de marchandage de main-d'oeuvre. Rappelons que dès la fin du 19esiècle la classe ouvrière s'est battue pour faire interdire les officines privées qui monopolisaient le placement des travailleurs à la recherche d'un emploi, en les rançonnant. Les travailleurs ne demandaient pas à l'État, mais aux syndicats d'accomplir cette tâche. C'est même pour cela que furent mises sur pied les premières Bourses du travail.

Le prétendu «modernisme» du placement privé consiste donc à exhumer les pires pratiques rétrogrades.

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