Sarkozy et la carte scolaire : La ségrégation sociale renforcée dans les écoles02/03/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/03/une1961.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sarkozy et la carte scolaire : La ségrégation sociale renforcée dans les écoles

Parmi les propositions pour l'UMP annoncées par Sarkozy mercredi 22 février, il y a celles concernant l'éducation. Il préconise pêle-mêle la suppression de la carte scolaire, l'autonomie des établissements, la rémunération des enseignants au mérite et l'implantation du privé dans les zones sensibles. Tout cela, bien évidemment, au nom de la liberté.

Aucune des mesures proposées n'a le mérite de l'originalité: elles figurent depuis des années dans les programmes et les discours des politiciens de droite et d'extrême droite.

Pour justifier «le libre choix des établissements par les parents», Sarkozy affirme que la carte scolaire telle qu'elle existe est «un privilège pour les uns, une fatalité pour les autres». Il laisse ainsi entendre qu'en imposant d'inscrire les enfants à l'école, au collège ou au lycée du quartier d'habitation, elle favoriserait les pauvres et pénaliserait les milieux aisés.

Dans son principe, la carte scolaire vise à éviter la ségrégation entre bonnes et mauvaises écoles. Sarkozy voudrait qu'on renonce ouvertement à cette règle, bien souvent contournée dans les faits. Mais si cela se faisait officiellement, cela ne ferait que creuser un peu plus les écarts, en facilitant la migration des élèves des milieux aisés, disposant donc a priori de plus de facilités, vers les «bons» établissements.

Selon Sarkozy, ce libre choix de l'établissement créerait «une émulation entre les établissements et inciterait chacun d'entre eux à améliorer ses performances». Il faudrait donc selon lui que chaque école soit autonome, en concurrence avec toutes les autres. Tout cela vise à caresser dans le sens du poil ceux qui n'imaginent pas pour l'éducation d'autres critères que ceux de la concurrence, clef de voûte de l'économie capitaliste. Encore faudrait-il pour que cette concurrence puisse jouer harmonieusement qu'elle soit «libre et non faussée», pour reprendre une formule qui a eu son heure de gloire au moment du référendum sur la Constitution européenne. Or cette concurrence-là est gravement faussée. Il est faux de prétendre qu'au départ les élèves ont tous les mêmes chances.

Sarkozy a beau jeu de parler d'encourager les établissements privés à s'installer dans les zones sensibles. Ils ont dès maintenant toute liberté de le faire. Mais s'ils le font si peu, c'est que cela n'intéresse pas la plupart d'entre eux, ni surtout les parents, qui choisissent ce type d'établissement parce qu'ils veulent pour leurs enfants les conditions d'enseignement les meilleures. Car ces établissements privés ne sont pas soumis à la carte scolaire et peuvent recruter leurs élèves sans obligation de résidence, et refuser ceux qui ne leur conviennent pas.

Dans cette société fondée sur l'inégalité -une inégalité qui se répercute forcément au plan scolaire- il faudrait donner bien plus de moyens à l'école qu'elle n'en a actuellement, afin de corriger cette inégalité. Sarkozy fait l'inverse. Il utilise la situation pour les besoins de sa propagande, et propose même de l'aggraver dans ses aspects les plus révoltants. Cela n'étonne pas, venant de sa part. Les «propositions de l'UMP sur l'école», loin de définir «les changements concrets qui donneront à l'école un visage plus moderne», ne sont que démagogie préélectorale. À supposer qu'elles passent dans les faits, tous les problèmes actuels de l'école seraient aggravés par des mesures encore plus ségrégationnistes.

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