Le sentiment de révolte en Seine-Saint-Denis... et la responsabilité de Citroën10/11/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/11/une1945.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le sentiment de révolte en Seine-Saint-Denis... et la responsabilité de Citroën

La situation de l'emploi apparaît en toile de fond de la révolte des jeunes de banlieue. Mais le silence règne sur la responsabilité sociale des grandes entreprises.

Un exemple est particulièrement parlant: celui de l'usine Citroën, en Seine-Saint-Denis justement. Depuis quinze ans, Peugeot Citroën Automobiles (PCA) à Aulnay-sous-Bois pratique une politique massive de recrutements en intérim ou CDD. Le but était évidemment d'augmenter la productivité par poste de travail, pour dégager le maximum de profits. Et il est atteint puisque l'usine d'Aulnay est la plus rentable du groupe PCA France.

Dans l'entreprise sont passés plus de 14000 précaires, des jeunes en général de Seine-Saint-Denis. Certains ont vu leurs contrats de travail renouvelés pendant des années, jusqu'à trois ans et demi, voire quatre ans, sans jamais être embauchés en fixe.

Il y a deux ans, 18 ouvriers et le syndicat CGT de l'entreprise ayant traîné le patron en justice, celui-ci a été condamné pour abus de travail précaire et abus de renouvellement de contrats de mission d'intérim. Citroën n'a cependant pas voulu requalifier les contrats précaires en contrats fixes, préférant encore indemniser les travailleurs. Il est vrai que ces indemnités sont rarement allées au-delà de 50000 F (entre 7000 et 8000 euros).

Depuis, le patron a quand même embauché en CDI 450 à 500 jeunes, mais il en reste encore environ un millier en précaire (il y a eu jusqu'à 1800 intérimaires pour un effectif de 6900 employés).

L'entreprise phare du département se sent toujours au-dessus des lois et entend rester le maître dans ses ateliers. Quitte, après avoir écrémé la jeunesse du département, comme l'a déclaré un responsable de l'usine il y a quelques années, à aller en grande banlieue pour trouver de la main-d'oeuvre... à faire travailler toujours en intérim, et dans la précarité, bien sûr.

C'est ainsi qu'on trouve en Seine-Saint-Denis de nombreux jeunes qui ont fait toutes les boîtes d'intérim, du département et d'autres, sans pouvoir trouver un emploi fixe. Depuis des années, ils sont devenus des travailleurs itinérants, sans perspective d'améliorer leur vie, passant de l'intérim au chômage puis au RMI et pour certains à la rue.

Les responsables politiques nationaux, régionaux, départementaux, municipaux, de droite ou de gauche, qui ont versé des aides à l'emploi à tous les patrons, ont donc laissé les employeurs, petits ou grands, faire surgir des dizaines de milliers de mécontents, des jeunes et des moins jeunes, dans les cités situées non loin des portes de leurs entreprises.

Et pas seulement parmi les ouvriers qualifiés et non qualifiés. Il suffit de voir certains de ces jeunes (une minorité pourtant), diplômés bac+2 et même bac+3, exploités en tant que stagiaires et se sentant obligés de se masquer la figure, lorsqu'ils sont interviewés et dénoncent leur vie misérable dans les entreprises qui ne les payent même pas au smic.

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