Lundi de Pentecôte : au programme, lundi 16 mai: «L’Arnaque»22/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1916.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Lundi de Pentecôte : au programme, lundi 16 mai: «L’Arnaque»

Il n'est pas question du film, le 16 mai, mais de la politique du gouvernement en matière de «solidarité» avec les personnes âgées et handicapées. Un autre genre de cinéma. Depuis le 30 juin 2004 en effet, le Parlement a définitivement adopté l'idée d'une journée de travail supplémentaire non rémunérée, fournie chaque année par les salariés, en contrepartie d'une cotisation patronale représentant 0,3% de la masse salariale annuelle des entreprises et des agents de l'État.

À l'approche de la journée de travail gratuite du lundi de Pentecôte, de plus en plus impopulaire, un certain nombre de grandes entreprises ont déjà préféré annoncer qu'elles renonceraient à l'imposer aux salariés. C'est le cas de TF1, Mondial Assistance, Shell ou BASF. Sur le mode généreux, le PDG de TF1 a senti le vent et annoncé fin janvier qu'il verserait sa contribution de 600000 euros afin que les 3500 salariés du groupe puissent rester chez eux. Chez Mondial Assistance, le DRH précise que son entreprise n'a «pas envie de déclencher un mouvement social pour si peu», c'est-à-dire pour les 126000 euros qu'elle versera sur sa masse salariale. D'autres, comme la Société Générale, ont d'office placé un jour obligatoire de RTT à cette date.

D'autres patrons, comme ceux de Total, Renault ou la BNP Paribas, en restent à la lettre de la loi: sept heures travaillées non rémunérées, le lundi de la Pentecôte étant désigné si aucun accord n'a été négocié avec les organisations syndicales pour déterminer un autre mode de... racket.

Car, sur le principe de la journée proposée par le gouvernement de Raffarin, il y a de quoi satisfaire le patronat et le Medef. La loi crée une «Caisse nationale de solidarité» que seuls les salariés vont devoir alimenter. Elle instaure un peu plus de flexibilité dans le temps de travail annuel et écorne le principe du jour férié non travaillé, puisqu'il est clairement stipulé que le lundi de Pentecôte reste l'un des onze jours fériés institués par le Code du travail. Quant au reversement à la Caisse de solidarité, un simple calcul montre que, dans les entreprises privées, le patron empochera l'équivalent d'une journée de travail, soit 0,46% de la masse salariale annuelle, sans compter la majoration pour heures supplémentaires et la cotisation sociale patronale, toutes deux non versées, et ne reversera que 0,3% des salaires de l'année. À ce gain du patron s'ajouteront les bénéfices réalisés sur la vente de ce qui aura été produit lors de cette journée de production supplémentaire.

Tout cela, du moins, à la condition que tout fonctionne comme le souhaite le gouvernement... ce qui est de moins en moins certain. Car pour nombre de salariés, plus la date approche, moins existe l'envie de travailler une journée gratuitement pour le patron ou pour l'État! Plusieurs syndicats ont déjà appelé à la grève le lundi de Pentecôte, contre les attaques sur le temps de travail ou pour des revendications salariales. Le Premier ministre s'est cru obligé d'argumenter sur les «deux milliards d'euros, l'équivalent de deux téléthons», que rapporterait en 2005 la journée travaillée gratuitement. Il a même perfidement lancé, aux syndicats qui appellent à la grève le 16 mai dans l'Éducation nationale, qu'«on ne peut pas prétendre qu'un fonctionnaire, qu'un enseignant n'aurait pas un travail productif». Coup de pied de l'âne plutôt que coup de chapeau aux personnels des services publics, aux enseignants, surveillants, agents dont les postes sont supprimés!

Quant au 1,9 milliard d'euros que le gouvernement prétend tirer du lundi de Pentecôte et qui, aux dires de Raffarin, «rendrait possible la construction d'une nouvelle maison de retraite par an et par département», ne pourrait-il pas tout simplement être prélevé sur les cadeaux que fait le gouvernement aux patrons, par exemple sur les 20 milliards d'euros représentés par les exonérations de charges patronales, ou bien sur les trois milliards de commandes de matériel militaire passées par la ministre de la Défense pendant le seul mois de décembre dernier?

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