Handicapés : Une législation qui protège davantage les patrons18/11/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/11/une1894.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Handicapés : Une législation qui protège davantage les patrons

Comme chaque année, l'association chargée de l'insertion professionnelle des handicapés organise une semaine de rencontres avec les entreprises susceptibles de les embaucher. À l'heure actuelle, 245000 personnes handicapées qui auraient la possibilité de travailler sont sans emploi, plus d'une sur quatre.

Les handicapés sont touchés par le chômage, nettement plus que les personnes valides, pour des périodes plus longues et rencontrent plus de difficultés à trouver un emploi stable.

Pourtant, une loi de 1987 précise que les patrons employant au moins vingt salariés doivent embaucher des handicapés dans la proportion de 6% de leur effectif. Dix-sept ans après, plus de la moitié d'entre eux se dérobent à cette obligation élémentaire, sans pour autant être hors la loi puisque celle-ci a prévu plusieurs échappatoires. Les patrons peuvent se dispenser d'embaucher en signant un contrat de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services avec un CAT ( Centre d'Aide par le Travail) qui échappe à la législation sociale, au contrôle de l'inspection du travail et à l'obligation du smic.

Un autre moyen de se dérober consiste à verser une contribution très modeste à l'Agefiph, organisme chargé de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés. Parmi les 40 entreprises françaises considérées comme les piliers de la Bourse (le "CAC 40"), 35 emploient une proportion de travailleurs handicapés inférieure à 6%.

Et quand bien même un patron respecte ce minimum, il a encore la possibilité de tronquer les chiffres car une même personne embauchée peut être comptabilisée pour plusieurs handicapés en fonction notamment de la gravité de son état! De plus, un patron a le droit de déclarer pour ses entreprises des effectifs inférieurs à la réalité en soustrayant les "emplois exigeant des conditions d'aptitudes particulières" et qui sont par conséquent "difficilement accessibles aux travailleurs handicapés". Les 6% sont donc remis en cause par la loi qui est censée les instituer. Sans parler de la faiblesse des contrôles pour vérifier si les patrons la respectent.

Une nouvelle loi qui doit être votée à la fin de l'année devrait en principe augmenter le prix à payer pour les patrons qui choisissent de ne pas embaucher des personnes handicapées. L'État et les collectivités locales devraient finir par se voir appliquer à eux aussi l'obligation d'embaucher des handicapés... d'ici à cinq ans si tout va bien. Mais ils auront de toute façon la possibilité de se dérober à cette obligation de la même façon que le secteur privé. Il n'est donc pas étonnant que les associations de handicapés aient exprimé leur scepticisme sur l'efficacité des mesures annoncées.

La législation est censée aider les personnes handicapées, mais il existe une loi beaucoup plus puissante: la loi du profit qui est une loi sans pitié et sans justice.

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