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États-Unis : Quelle régularisation pour les travailleurs immigrés illégaux?

Le Président Bush a proposé le 7 janvier une loi qui permettrait aux travailleurs immigrés entrés illégalement aux États-Unis, à la condition qu'ils justifient d'un emploi, d'obtenir un statut légal de travailleur temporaire. Cela pourrait concerner de 8 à 14 millions de personnes. Ce statut serait accordé après une démarche conjointe du travailleur et de son employeur. Il serait accordé pour une période de trois ans renouvelable, et renouvelable seulement une fois, si l'on en croit les premières précisions apportées par les conseillers de Bush.

Ce statut permettrait, en théorie, à ces travailleurs de bénéficier des mêmes droits que les autres travailleurs. Il leur permettrait aussi de pouvoir effectuer des voyages vers leur pays d'origine.

Bien évidemment, chacun a remarqué le fort relent électoral d'une telle proposition. Au moment où s'ouvre une année d'élections, dont la présidentielle, George W. Bush, candidat non déclaré du Parti Républicain, serait satisfait de pouvoir obtenir les voix des électeurs d'origine hispanique, dont les vues sont réputées être proches des siennes sur les questions de religion et de sécurité.

De tels doutes naissent de l'examen des dispositions mêmes de la proposition de Bush. En effet, que se passera-t-il pour les immigrés qui se seront déclarés, auront obtenu ce statut, et qui, au bout de six ans, se verront recommander, voire ordonner, de retourner dans leur pays d'origine? En théorie, ces travailleurs, ayant acquis ce nouveau statut, pourraient entamer les (longues) démarches pour obtenir la fameuse "carte verte" qui est un permis de résidence permanent. Mais les officiels eux-mêmes reconnaissent que ce marathon peut durer plus de six ans et donc, à son issue, laisser les candidats dans le vide. Une porte-parole de l'organisation de défense des droits de ces travailleurs The National Council of La Raza, a exprimé ainsi ses doutes: "Ils demandent aux immigrés de s'engager par écrit pour une régularisation qui va plus probablement assurer leur départ que leur résidence permanente."

Les travailleurs immigrés des États-Unis, venus majoritairement des pays d'Amérique latine, en particulier du Mexique, paient un lourd tribut à leur participation à la vie économique de la première puissance mondiale. Comme les peuples de leurs pays d'origine paient un lourd tribut à la domination impérialiste, et d'abord celle des États-Unis, dans leur hémisphère. Chacun sait les énormes obstacles que l'État américain met à l'entrée d'immigrés qui, qu'ils soient clandestins ou pas, seront ensuite relégués aux tâches les plus ingrates et privés de nombreux droits élémentaires.

Le président Bush, dans le discours présentant sa proposition, s'est permis de dire: "Nous devons nous assurer que les nouveaux citoyens connaissent, non seulement les événements de notre histoire, mais les idéaux qui ont donné vie à cette histoire." Les milliers de migrants morts au cours de tentatives pour rejoindre les États-Unis, les conditions souvent abominables dans lesquelles les employeurs, petits ou grands, maintiennent ces travailleurs, témoignent de la façon dont s'incarnent ces "idéaux" de la bourgeoisie américaine.

Jean MASSARDIER

Quelques chiffres

Les recensements ont établi qu'entre 1990 et 2000, la population des États-Unis a augmenté de 32,6 millions. L'augmentation de la population immigrée est estimée à 14,1 million, soit 43,4% de l'augmentation totale.

Le même Bureau du Recensement estime qu'en 2000, sur une population laborieuse totale de 149 millions de personnes, les immigrés comptaient pour 19 millions, soit près de 13%. Ce pourcentage se monte à 15,6% pour le Texas, 23,4% pour la Floride, 24,8% pour l'État de New-York et 31% pour la Californie.

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