Les directions syndicales sabotent les mouvements auxquels elles appellent15/01/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/01/une1850.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les directions syndicales sabotent les mouvements auxquels elles appellent

À EDF le 20 janvier, à la SNCF le 21 janvier, dans les hôpitaux le 22 janvier. Quant à la Fonction publique, elle attendra la semaine suivante. Voilà la façon dont les directions syndicales, et en particulier la plus influente d'entre elles, la CGT, appellent les travailleurs à entrer en lutte contre les coups qui les frappent.

Cet appel à une mobilisation en ordre dispersé est un véritable sabotage préventif.

À EDF, les directions syndicales qui se sont donné la peine de faire diffuser un tract à plusieurs millions d'exemplaires pour dénoncer -à juste titre- la remise en cause du statut des travailleurs de l'EDF et les menaces de privatisation, se contentent d'appeler à un grand rassemblement en région parisienne, le 20 janvier.

À la SNCF, la CGT, la FGAAC (syndicat des agents de conduite), FO et Sud-Rail appellent à une journée nationale de grève.

Les personnels des hôpitaux, une fois que les cheminots auront repris le travail, sont appelés à une journée de grève contre la politique de restrictions du gouvernement.

Quant aux travailleurs de la Fonction publique, ils ne seront concernés pour une "semaine d'action" que plus tard, du 26 au 30 janvier.

A quoi rime un tel calendrier de journées et d'actions dispersées, alors que le gouvernement mène une offensive concentrée contre tous les travailleurs, qu'ils soient du secteur public ou des entreprises privées, chômeurs ou retraités compris? À l'heure où il est indispensable de rassembler les forces de l'ensemble des travailleurs, les directions syndicales font la démonstration qu'elles ne le veulent pas.

En fait, les confédérations syndicales semblent bien moins préoccupées de mettre en échec les attaques du gouvernement que du rôle que celui-ci voudra bien leur laisser. Elles ne conçoivent pas l'intervention des travailleurs comme une pression pour obtenir gain de cause mais comme un soutien symbolique de leurs discussions avec le gouvernement. C'est en particulier le cas à la SNCF, où les cheminots ne sont appelés à la grève que pour soutenir les rencontres engagées au même moment avec la direction.

Pourtant, les raisons de se défendre s'accumulent: les salaires bloqués (ou des augmentations dérisoires), les suppressions de postes dans la Fonction publique, les licenciements et plans sociaux dans le secteur privé, les conditions de travail partout dégradées avec la préparation de la part du gouvernement et du Medef d'une remise en cause générale du Code du Travail, l'amputation des retraites, les augmentations annoncées puis démenties (mais pour combien de temps?) de la CSG pour les chômeurs et les retraités, les attaques contre l'assurance maladie, l'annonce d'un dispositif anti-grève dans les transports en commun, sous prétexte de "service minimum". Dans un tel contexte d'offensive de la part du patronat et du gouvernement, que les syndicats appellent les travailleurs à la lutte est plus que justifié. Mais ils le font, volontairement, de la pire façon qui soit.

Or rien ne dit que, dans la situation actuelle, les travailleurs aient le moral pour entrer en lutte. Des raisons de se défendre ils en ont, mais comment auraient-ils confiance dans les résultats de telles luttes? Les grèves ne sont pas un jeu.

Les organisations syndicales devraient tout faire pour leur redonner confiance dans leur force, au lieu d'augmenter leur démoralisation. Si elles avaient appelé chaque secteur à entrer en lutte en même remps, cela n'aurait pas été plus difficile pour les travailleurs, qui se seraient sentis plus forts parce que plus nombreux.

De telles journées doivent être des journées de mobilisation, préparant une lutte plus importante. Mais la stratégie qu'adoptent les directions syndicales est tout à fait voulue pour que cela ne fasse pas trop mal à l'État et, derrière l'État, au patronat.

Ce n'est pas une raison pour ne pas suivre ces appels, mais c'est une raison pour se dire qu'à un moment ou un autre, il faudra faire sans eux car, que ce soient les dirigeants de la CGT, ceux de la CFDT, de FO ou des autres syndicats, ils ne sont vraiment pas dans le camp des travailleurs! Ils défendent leur existence de représentants patentés, au mépris du dévouement de leurs propres militants et au mépris des intérêts des travailleurs.

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