Prix Nobel de la Paix : Une Iranienne militante pour les droits des femmes16/10/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/10/une1837.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Prix Nobel de la Paix : Une Iranienne militante pour les droits des femmes

C'est donc une femme, iranienne, musulmane, militante des droits de l'homme et des droits de la femme dans son pays, Shirin Ebadi, qui vient de recevoir le prix Nobel de la Paix. Ce prix n'est certes pas une référence, ne serait-ce que parce que le Comité Nobel l'a attribué par le passé à des hommes comme Henry Kisinger ou Menahem Begin, mais le fait que Shirin Ebadi le reçoive a au moins pour conséquence de mettre sous les feux de l'actualité la difficile situation des femmes en Iran. Ce qui est sans doute un des motifs du choix du Comité Nobel.

En 1974, à l'âge de 26 ans, Shirin Ebadi était nommée juge, présidente du tribunal de grande instance de Téhéran, ce qui est rare pour une femme et a fortiori en Iran. C'était au temps du régime du Shah qui, s'il opprimait tout autant la population que le régime actuel, avait cependant des aspects plus modernistes se traduisant par plus de libertés pour les femmes, au moins celles de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie.

Après l'instauration de la République islamiste de Khomeyni, en 1979, elle fut destituée. Les intégristes islamistes désormais au pouvoir estimaient qu'une femme est par nature trop émotive pour pouvoir assurer de telles fonctions! Devenue avocate, elle prit alors des positions courageuses en défendant les droits des femmes et des enfants.

Après les émeutes de 1998 et 1999, elle défendit les étudiants et les intellectuels victimes de la répression du nouveau président de la République, Khatami, dont ils espéraient -et dont elle-même espérait- des réformes libérales. Elle le paya, en juin 2000, de 25 jours d'isolement en prison pour avoir enquêté sur les meurtres d'opposants et avoir diffusé un témoignage sur l'assassinat d'un étudiant.

Shirin Ebadi, comme elle le dit aujourd'hui, "a appris à surmonter sa peur. Sinon on vit avec elle de la naissance à la mort". Elle est une femme, une intellectuelle libérale, d'un grand courage mais elle n'est pas révolutionnaire. Du reste, le Comité Nobel n'a pas l'habitude de décerner son prix aux révolutionnaires et c'est en connaissance de cause qu'il a fait son choix, apportant ainsi son soutien à la fraction de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie iranienne qui souhaite voir se desserrer l'étreinte des mollahs.

Aujourd'hui, en Iran, Shirin Ebadi continue avec détermination et courage son combat, milite pour l'abolition des peines d'amputation et des peines de lapidation des femmes adultères ou supposées telles et, plus généralement, contre les discriminations sociales faites aux femmes.

Mardi 14 octobre, à son retour de Paris, la lauréate du Nobel de la Paix a été accueillie en triomphe à l'aéroport de Téhéran. Sa nomination au Nobel a sans doute été ressentie comme un encouragement par de nombreuses femmes iraniennes et par tous ceux qui aspirent à plus de libertés. Mais le combat contre l'oppression des femmes, de toutes les femmes, en Iran, ne peut pas être séparé du combat contre l'oppression sociale, contre le régime qui la maintient, y compris contre les tenants plus ou moins libéraux de ce régime.

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