McDonald's Paris(Strasbourg-Saint-Denis) : Après plus de 80 jours de grève12/06/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/06/une1819.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

McDonald's Paris(Strasbourg-Saint-Denis) : Après plus de 80 jours de grève

Le 2 février 2002, après presque quatre mois de grève, les salariés du McDonald's du carrefour Strasbourg-Saint-Denis à Paris signaient un protocole de fin de conflit qui obligeait le franchisé (le patron du restaurant) à réintégrer cinq salariés dont il avait voulu se débarrasser parce que trop revendicatifs, leur faute à ses yeux étant d'avoir demandé l'élection des délégués du personnel, ou encore organisé un mouvement de grève en soutien au militant syndical menacé de licenciement pour avoir demandé l'organisation des élections. Mais la direction McDo-France (qui exerce un contrôle étroit sur les franchisés) n'entendait pas en rester là. Plutôt du genre revancharde, elle confiait le restaurant à un nouveau gérant, ayant pour mission de "nettoyer" un établissement présenté comme "ingérable "parce que comprenant un trop fort pourcentage de salariés revendicatifs et syndiqués à la CGT.

Le nouveau gérant devait rapidement montrer qu'il avait trois préoccupations essentielles: présenter le restaurant comme déficitaire (en gonflant notamment les prix des contrats passés avec les sociétés prestataires chargées du nettoyage des locaux et du gardiennage); provoquer l'écoeurement des salariés en organisant la dégradation des conditions de travail; ne remplaçant pas des équipiers mis arbitrairement à la porte, obligeant ainsi ceux qui restent à travailler en sous-effectif (les salariés de Strasbourg-Saint-Denis qui étaient allés dénoncer cette situation au siège de McDo-France au mois de janvier dernier ont même eu pour réponse concrète les coups de matraque des flics venus les expulser de locaux où ils étaient censés être chez eux). Enfin, une autre de ses préoccupations s'avéra être de faire profiter les membres de sa famille et une partie de l'encadrement de l'ancien restaurant qu'il dirigeait lors de sa venue à Strasbourg-Saint-Denis en leur offrant des emplois plus remarqués par l'importance de leur rémunération que par celle de leur charge de travail.

La réponse du gérant aux demandes d'explications des salariés du restaurant concernant des pratiques pour le moins contestables fut claire. Il engageait, le 11 mars 2003, une procédure de licenciement, accompagnée d'une mise à pied conservatoire, à l'encontre de Tino, l'un des porte-parole des salariés mécontents. Sous-directeur du restaurant, il avait témoigné en faveur des salariés à l'occasion du procès prud'homal de l'année dernière et était devenu au lendemain du conflit représentant syndical.

Depuis cette date, les salariés du restaurant, dans leur quasi-totalité, sont en grève pour soutenir les revendications suivantes:

-respect des libertés syndicales et des droits des représentants du personnel

-arrêt immédiat de la procédure de licenciement de Tino Fortunat

-embauches supplémentaires pour mettre fin à la dégradation des conditions de travail

-paiement des heures effectives travaillées et versement des salaires à l'échéance normale

-augmentation des salaires de 10%

-non au sabotage du restaurant!

Les grévistes se rendent dans d'autres McDo non seulement pour organiser des blocages mais aussi pour s'adresser aux autres salariés pour les inviter à soutenir et à rentrer en lutte pour obtenir une augmentation de salaires et de meilleures conditions de travail. Le contact n'est pas très facile, notamment du fait de la pression exercée par l'encadrement des restaurants visités, qui veille à ne pas laisser les équipiers discuter librement avec les grévistes.

Mais, parfois, le courant passe. La toute jeune section syndicale CGTM des restaurants McDonald's de la Martinique, qui a eu vent du mouvement de Strasbourg-Saint-Denis, a fait parvenir aux grévistes un communiqué de soutien. Des liens se sont créés avec les salariés du McDo de la Porte de Saint-Cloud, qui ont observé trois jours de grève à la fin du mois de mai pour protester contre un licenciement et défendre des revendications concernant les conditions de travail. Fort curieusement, le journaliste du Parisien a cru devoir titrer, au lendemain de la grève du McDo de la Porte de Saint-Cloud: "La grève du McDo du boulevard Saint-Denis ne prend pas"...

Les grévistes ont découvert la solidarité de militants syndicaux d'autres professions à l'occasion du blocage de la plate-forme de Fleury-Mérogis, où sont conditionnés les pains qui servent à fabriquer les hamburgers. Ils ont rencontré avec plaisir des syndicalistes des transports qui étaient venus de Caen et de Rennes pour leur donner un coup de main.

Deux points ont été marqués qui ont contribué à maintenir le moral au beau fixe. Le Tribunal de Grande Instance, statuant en référé, a refusé d'ordonner que les grévistes qui occupent les locaux jour et nuit soient expulsés du restaurant.

L'inspectrice du travail n'a pas pris pour argent comptant les accusations d'insubordination et de rétention de documents formulées à l'encontre de Tino et a refusé son licenciement, après avoir relevé que la procédure de licenciement n'était pas sans lien avec son mandat de représentant syndical.

Mais, sur les autres revendications, c'est le silence radio du côté de McDo. Aussi, la lutte continue.

Elle est parfois un peu rude. Lors de la venue au restaurant de Boulogne-Billancourt, les forces de police déclenchèrent immédiatement les hostilités en malmenant et en faisant sortir brutalement du restaurant les grévistes qui n'eurent même pas le temps d'expliquer les raisons de leur présence. Un de nos camarades s'est retrouvé en garde à vue pendant toute une journée et se retrouve, injustement, convoqué devant le tribunal pour "outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique" et "rébellion". (L'audience est prévue le 2 juillet à 15 heures devant la 14ème chambre du Tribunal de Grande Instance de Nanterre).

Mais les grévistes ne se laissent pas abattre et sont plus que jamais déterminés à faire céder McDo sur leurs revendications. Ils invitent toutes celles et tous ceux qui sympathisent avec leur combat au bal de soutien organisé par la CGT et animé par Les Szagboonistes le 12 juin au Cirque du Dr Paradi, place Stalingrad (participation 5 euros).

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