Irak : Les indignations calculées de Chirac24/04/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/04/une1812.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak : Les indignations calculées de Chirac

Lors de la réunion des quinze chefs d'État ou de gouvernement à Athènes, Chirac a fait entendre son "indignation" à propos de ce qui se passe en Irak, dénonçant les "véritables crimes contre l'humanité" qui s'y commettent, les qualifiant de "désastre pour l'humanité".

Chirac s'en prenait-il à la guerre qui se mène depuis un mois, avec ses dizaines et même plus vraisemblablement ses centaines de milliers de morts sous les bombardements massifs? Dénonçait-il la terreur exercée contre tout un peuple par des puissances impérialistes, la détresse dans laquelle les guerres successives et l'embargo l'ont plongé? Faisait-il référence aux blessés, aux enfants, aux personnes âgées qui meurent par milliers faute de soins, de médicaments, de nourriture ou tout simplement d'eau potable? Non, sur ces massacres de la population irakienne qui continuent à se perpétrer, Chirac n'a semble-t-il rien à dire. Ce qui suscite son indignation, en revanche, ce sont les pillards qui s'en sont pris aux musées de Bagdad et de Mossoul.

Certes, il est désolant de voir une partie des trésors de ces musées, témoignages du riche passé de cette région du globe qui vit le début de la civilisation et l'apparition de l'écriture, disparaître ainsi pour être vendus à la sauvette sur les marchés en échange de nourriture, ou plus vraisemblablement passer entre les mains de trafiquants d'objets d'art prêts à tout pour satisfaire leurs riches clients. Mais face à toutes ces vies brisées, à un pays en ruines où les gens manquent de tout, les indignations de Chirac semblent déplacées.

Sans parler du pillage des ressources d'un pays que les grandes puissances, les États-Unis en tête, s'apprêtent à commettre, il serait bon aussi de se rappeler l'origine des antiquités que possèdent des grands musées occidentaux: elles proviennent du pillage de la Grèce, de l'Egypte ou même... de la Mésopotamie, l'Irak actuel: en 1842, Paul Botta, alors consul de France à Mossoul, expédia à Paris ce qu'il pouvait trouver, depuis les tablettes qui témoignent du début de l'écriture jusqu'à des pans entiers d'un palais avec ses sculptures géantes, commençant à alimenter le fonds d'antiquité mésopotamienne du musée du Louvre. Ses collègues anglais faisaient de même, à plus grande échelle, pour alimenter le fonds bien fourni du British Museum de Londres.

En matière de pillage, les pays impérialistes n'ont de leçon de morale à donner à personne.

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