Dans le monde

Sommet de Barcelone : Tous d'accord pour privatiser les services publics

Les 15 et 16 mars devait avoir lieu à Barcelone le sommet des chefs d'Etat européens. Ceux-ci devaient notamment y discuter de la libéralisation des services publics, chemins de fer, électricité, services postaux, et de l'assouplissement des protections sociales, considérées comme des " freins à l'emploi ". A la veille de ce sommet, les syndicats européens, et en particulier la CGT, appelaient à manifester.

Sur tous ces problèmes, les gouvernements européens sont d'accord pour l'essentiel. Ils ont depuis longtemps engagé une politique d'ouverture des services publics au privé, chacun pour leur propre compte, sans avoir besoin des institutions européennes. En France par exemple, dans le domaine des communications, c'est en 1991 que le ministre socialiste Paul Quilès a ouvert la voie en séparant La Poste de la branche des télécommunications, qu'il destinait à une privatisation accélérée. Cette politique correspond partout au même désir d'offrir aux grands trusts privés un nouveau champ de profits, et de récupérer des dizaines de milliards d'argent frais, que l'Etat pourra reverser aux capitalistes sous forme de subventions diverses.

S'il y a discussion entre les autorités des différents pays européens, c'est uniquement sur le rythme auquel doit intervenir cette ouverture au privé. Tous sont d'accord pour une libéralisation quasi totale à l'horizon d'une dizaine d'années. Mais d'ici là, certains voudraient aller plus ou moins vite.

Ainsi, pour les services postaux, le débat porte uniquement sur les paliers qui vont permettre d'ouvrir une part toujours plus grande du courrier à la concurrence. En décembre 2000, au Parlement européen, les députés liés au gouvernement français ont " défendu " le service public... en proposant d'étendre la concurrence à tout le courrier de plus de 150 g, au lieu de 350 g auparavant. Ils présentaient cela comme du réalisme, face à une proposition de la Commission européenne d'abaisser directement le seuil à 50 g.

Pour l'énergie, le gouvernement français se déclare pour une " ouverture maîtrisée et progressive des marchés électriques et gaziers ". Aujourd'hui, la concurrence, décidée au niveau européen depuis des années, n'est appliquée en France que pour les très gros usagers, qui représentent quand même un tiers du courant. Le reste, les petits usagers, relève toujours du monopole de l'EDF. Ce n'est apparemment qu'une question de temps. EDF est toujours une société d'Etat, mais jusqu'à quand ? La droite comme la gauche prônent sa privatisation. Fabius et Strauss-Kahn en sont même déjà à vendre sa peau avant de l'avoir privatisée, le premier déclarant que l'Etat devra garder plus de 50 % de son capital, alors que le second affirme que ce seuil " n'est pas inscrit dans le marbre ".

Tous ceux qui vont se réunir à Barcelone ont, vis-à-vis des travailleurs, les mêmes objectifs. Dans ces sommets européens, les dirigeants français aiment à se faire passer pour les défenseurs d'un " service public à la française " face aux " ultra-libéraux " que seraient Blair, Aznar ou Berlusconi. Ils aiment aussi apparaître plus attachés aux " objectifs sociaux ", quitte à faire un peu de cinéma. Elisabeth Guigou, en avant-première, vient ainsi de refuser à Bruxelles un texte espagnol, en déclarant fièrement : " Je refuse l'idée que nous devons demander aux personnes d'accepter n'importe quel emploi ". Il faut le faire, quand on est la ministre du PARE !

Mais, l'hypocrisie en plus, la politique des dirigeants français, tout comme celle de leurs homologues des autres pays, vise à démanteler les protections sociales. Quant au fait qu'ils jugent préférable de prendre un petit peu plus de temps pour livrer les services publics au privé, cela n'en fait pas pour autant leurs protecteurs. Partout, qu'elle ait été rapide ou plus étalée dans le temps, cette privatisation s'est faite au détriment des usagers, en augmentant les prix et en diminuant la qualité du service. Les travailleurs de ces secteurs ont payé un lourd tribut, par des licenciements massifs et l'aggravation de leurs conditions de travail. Les seuls à qui ces opérations ont profité, ce sont les capitalistes qui ont trouvé là l'opportunité de mettre la main sur de nouvelles sources de profit. Ce sont eux que défendent aussi bien Chirac et Jospin que Blair, Aznar ou Berlusconi.

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