Palestine : L'impasse du processus de paix et du nationalisme14/12/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/12/une-1743.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C164%2C225_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Palestine : L'impasse du processus de paix et du nationalisme

Désormais, il ne s'agit plus seulement de meurtres par les soldats israéliens de gamins armés de pierres, ni même de l'" exécution préventive " de militants palestiniens : toute la semaine dernière, les hélicoptères de Tsahal ont méthodiquement bombardé les locaux de l'Autorité palestinienne. En représailles aux attentats des islamistes du Hamas qui ont tué une trentaine d'Israéliens, le premier week-end de décembre le gouvernement israélien a franchi une étape dans la guerre, menée maintenant ouvertement contre le semblant d'Etat palestinien. A travers lui, bien sûr, une guerre contre les Palestiniens eux-mêmes dont il s'agit d'écraser la révolte dans ces camps de prisonniers que sont devenus leurs " territoires ". Mais aussi une guerre faite avec la peau du peuple israélien, otage d'un gouvernement qui, plus encore que l'extrême-droite islamiste, fait son beurre du climat de peur régnant en Israël. Le terrorisme d'Etat israélien avec sa réplique palestinienne à petite échelle, c'est toute la politique de Sharon, laquelle, comme le dit une Israélienne, " transforme nos en fants soit en assassins, soit en assassinés ".

Les accords d'Oslo de 1993, censés aboutir à la création d'un Etat palestinien, ont fait long feu. En bons nationalistes bourgeois, les leaders de l'OLP avaient présenté au peuple palestinien ces accords comme une victoire. Ils ont surtout permis de mettre un temps sa révolte en veilleuse sans satisfaire aucune de ses aspirations. Car l'Etat d'Israël n'a jamais eu l'intention de céder davantage aux militants de l'OLP que le droit de jouer les " matons " à sa place dans les camps de réfugiés. Pendant toutes ces années la politique de colonisation israélienne s'est poursuivie, sous les gouvernements de gauche comme de droite, (il y a même eu plus de créations de colonies sous le travailliste Barak que sous le chef du Likoud Nétanyahou).

La colère de la population palestinienne exaspérée grondant à nouveau, un Sharon a finalement jugé qu'il était temps de cesser de faire semblant. Et en septembre 2000 sa provocation à l'esplanade des Mosquées a sciemment remis le feu aux poudres. Depuis un an cette guerre a fait plus de mille morts, dont 200 Israéliens et quatre fois plus de Palestiniens. Et maintenant que le fossé de sang est de plus en plus profond entre les deux peuples, que la peur du côté israélien a permis à Sharon de réaliser une certaine union sacrée autour de lui, l'Etat d'Israël peut passer à la vitesse supérieure, reprendre toutes les concessions dérisoires faites aux Palestiniens, et démanteler pièce par pièce l'Autorité palestinienne qui n'était qu'une façade. Sharon applique l'idée de son chef d'état-major Mofaz, selon lequel si la première Intifada a abouti à " la grande erreur " des accords d'Oslo, c'est que la répression a été " trop molle " : cette fois " Il faut leur briser les membres " (c'était l'expression... du travailliste Rabin).

Cette politique de table rase n'est peut-être pas celle qui a la préférence des puissances impérialistes, à commencer par les USA, premier soutien d'Israël. Sans doute s'inquiètent-elles un peu de la marginalisation des nationalistes palestiniens, qui ont été les meilleurs gardes-chiourme de leur propre peuple et des " interlocuteurs " responsables Mais finalement, l'utilité des vieux leaders du Fatah s'est beaucoup usée avec eux dans les compromissions du " processus de paix ". Et si Sharon pense pouvoir garder la main sur la situation par une politique de force, grâce à l'aviation et aux blindés américains, les dirigeants des Etats-Unis ne s'y opposent pas. D'autant moins qu'après avoir eu les mains libres pour réaliser leur démonstration de terrorisme en Afghanistan, ils n'ont plus besoin de faire mine de ménager l'opinion des peuples arabes, du moins peuvent-ils le penser.

Pour le moment, cette politique de répression pure a plutôt abouti à exacerber la colère des Palestiniens. Tout en les poussant dans les bras du Hamas. Alors bien sûr, si le nationalisme de l'OLP a mené les Palestiniens dans cette impasse, ce n'est pas le terrorisme réactionnaire et religieux des islamistes qui les en sortira. La révolte du peuple palestinien est loin d'avoir trouvé sa propre voie. Mais elle survit, et elle ne semble pas près de s'éteindre.

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