Leur société

SMIC : À défaut de l'augmenter vraiment, le gouvernement les multiplie

Avec l'application de la loi Aubry sur les 35 heures, le calcul du SMIC est devenu un vrai casse-tête, et pour beaucoup de salariés une véritable entourloupe.

Du triple SMIC...

A l'origine, il y a la décision du gouvernement d'instituer, dans le cadre du passage aux 35 heures, un SMIC à plusieurs niveaux. Pourtant le gouvernement avait promis que le passage de 39 heures à 35 heures se ferait sans diminution de salaire. Pour maintenir la rémunération des salariés payés au SMIC, le gouvernement a choisi d'instaurer "un complément différentiel".

Le flou autour de cette disposition est tel qu'il rend déjà possible l'existence de deux SMIC : l'un, perçu par les anciens embauchés passés aux 35 heures et qui bénéficient du complément, l'autre perçu par les nouveaux embauchés qui feront 35 heures... payées 35, soit près de 500 F en moins.

En plus de cela, le gouvernement s'est arrangé pour que la progression du "complément différentiel" soit plus faible que celle du taux horaire du SMIC. Du coup, depuis le 1er juillet dernier, date de la dernière augmentation du SMIC horaire (+3,2 %), le SMIC mensuel brut 39 heures est de 7 101 F alors que le SMIC mensuel brut 35 heures est de 6 981 F (si l'on bénéficie du complément) !

... au quadruple SMIC et plus !

La chose se complique encore du fait que le passage aux 35 heures est étalé dans le temps. Sans rentrer dans les détails de ces comptes d'apothicaire, on se retrouve maintenant dans la situation où un salarié payé au SMIC peut percevoir 6 896 F brut si son employeur est passé aux 35 heures entre le 1er juillet 1998 et le 30 juin 1999, 6 982 F si cela s'est fait entre le 1er juillet 1999 et le 30 juin 2000, et ainsi de suite, sans parler de ceux qui ne sont pas encore aux 35 heures, de ceux qui sont aux 35 heures payées 35... !

Résultat : chaque année, on assiste au miracle de la multiplication des SMIC !

Le gouvernement botte en touche

Interpellé sur cette situation tant par les syndicats que par les patrons, le gouvernement n'a pas voulu indiquer clairement ses intentions. Normalement, le "SMIC-35 heures" ne doit exister que jusqu'en 2005. Ensuite, on devrait rétablir un SMIC horaire unique pour tous. Mais dans quelles conditions ? A quel taux ? Le plus bas ou le plus haut ? Quand on voit l'attitude du gouvernement dans cette affaire, on peut craindre le pire... pour les salariés.

Pour maintenir les salaires, le plus simple aurait été de corriger la baisse de l'horaire par une augmentation du taux horaire du SMIC. Mais cela aurait signifié une augmentation de 11,4 % de ce taux. Ce qui était hors de question pour le patronat... que le gouvernement ne veut aucunement contrarier.

Ce dernier a donc mis sur pied une véritable usine à gaz qui permet de moins payer de nombreux travailleurs, en espérant que cela ne se voie pas trop. Et maintenant, il joue la montre... en attendant les élections. A moins que, d'ici là, les travailleurs, comme l'ont fait les jeunes ouvriers de l'Alstom-Atlantique, à Saint-Nazaire, il y a deux semaines, viennent bousculer cet échafaudage abracadabrant.

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