Lire : Mémoires d'un rouge d'Howard Fast12/05/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/05/une-1661.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

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Lire : Mémoires d'un rouge d'Howard Fast

Auteur de romans historiques dont les plus connus sont Spartacus, La Route de la liberté ou Le citoyen Tom Paine, Howard Fast, né en 1914, fut lié au Parti Communiste américain jusqu'à sa rupture politique en 1956, après la dénonciation des crimes de Staline par le rapport Khrouchtchev. Dans ces Mémoires, parus il y a dix ans aux Etats-Unis, il revient sur ces années où il était " rouge ".

Fils d'un ouvrier juif d'origine ukrainienne, orphelin de mère, Howard Fast découvrit la vie dans les rues de quartiers pauvres. Mais, ayant découvert la lecture grâce aux bibliothèques, il devint un auteur précoce, échappant ainsi à sa condition. C'est en fréquentant des milieux intellectuels qu'il se rapprocha du parti. Il fut tenté d'y adhérer en 1934, période de radicalisation ouvrière, mais ses amis l'en dissuadèrent. Déçu par les procès de Moscou et le pacte germano-soviétique, il prit des distances et, comme d'autres intellectuels de cette période, il fut séduit par la personnalité des Roosevelt, notamment Eleanor, la femme du président des Etats-Unis.

Au début de la Deuxième Guerre mondiale, démocrate et patriote, il chercha à prendre du service comme correspondant de guerre. Il se retrouva à la Voix de l'Amérique, la voix de l'impérialisme américain, où il était ravi de rédiger le compte-rendu quotidien des opérations militaires en cours...

C'est à la fin de la guerre, dans la foulée de l'alliance entre les grands Etats impérialistes et l'URSS, qu'il adhéra au PC. Deux ans plus tard, la réaction maccarthyste commençait à se répandre. Elle frappa le milieu syndical proche du PC, mais on la voit ici dans le monde feutré de l'édition. Pour avoir participé au soutien de réfugiés républicains espagnols, il est condamné à un an de prison, par chance dans une prison modèle construite sous... Roosevelt. A sa sortie de prison, ses romans sont refusés par les grands éditeurs. Il dut publier Spartacus à compte d'auteur. Son engagement vis-à-vis du PC évolua : plutôt compagnon de route dans les années quarante, il prit des responsabilités dans les années cinquante, participant notamment à la rédaction du quotidien communiste jusqu'à sa rupture en 1956.

Fast n'a pas souhaité rentrer dans les détails de son engagement au PC. Il a choisi de s'adresser ici au grand public surpris qu'un romancier, bon vendeur de livres, ait pu avoir des liens avec les communistes. Il plaide en expliquant que le maccarthysme s'est attaqué à tort à toute une série de démocrates, d'intellectuels, de professionnels compétents qui auraient pu rendre de grands services à l'Amérique. Au passage, on apprend qu'il appartient, depuis 1960, à une congrégation religieuse...

Souvent irritant à la lecture, ce livre est révélateur du type d'engagement de bien des intellectuels auprès du parti stalinien. Au nom de la lutte de la démocratie contre le fascisme, ils choisirent de remettre à plus tard les questions qu'ils auraient pu se poser, ou qu'ils se posaient, sur le stalinisme. Quant à l'émancipation ouvrière, ce n'était pas leur souci, leur carrière les préoccupait plus. Quand les questions qu'ils ne s'étaient pas sérieusement posées finirent par leur revenir dans la figure, ils rejetèrent le communisme et le marxisme, parfois pour devenir des anticommunistes forcenés.

Peut-être plus courageux personnellement et un peu moins enclin à lâcher ses engagements, Fast résista au maccarthysme mais pas au rapport Khrouchtchev. Ses conclusions sur les dirigeants de partis, " tous pourris ", montrent qu'il n'a pas compris cette période beaucoup mieux qu'un McCarthy !

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