Dans le monde

Le parlement européen et la participation de l'extrême droite au gouvernement autrichien

La dernière session du Parlement européen, les 2 et 3 février 2000, à Bruxelles, a été dominée par l'arrivée au pouvoir gouvernemental en Autriche de la coalition formée par le parti conservateur, ÖVP, et le parti d'extrême droite, FPÖ, de Jörg Haider.

Les débats autour de l'attitude du Parlement à l'égard de cet événement ont fourni à Bayrou et à quelques membres de l'UDF l'occasion de faire des effets de manche en jouant les démocrates offusqués par la xénophobie affichée par Haider. Le PS, de son côté, était d'autant plus empressé de montrer son opposition que Haider lui a fourni un substitut au couple Le Pen-Mégret, lui permettant de se montrer radical sur un terrain où cela l'engage d'autant moins que cela se passe en Autriche.

Les indignations verbales de certains parlementaires européens de la droite ne peuvent cependant pas faire oublier que, en France, leurs partis ont participé au gouvernement qui a décidé les lois Pasqua-Debré, organisant la chasse aux travailleurs immigrés au nom de la lutte contre " l'immigration clandestine ", sans même parler de leur alignement sur la démagogie ordurière de l'extrême droite rendant les travailleurs immigrés responsables du chômage.

Quant au Parti Socialiste, sa dénonciation de Haider et de la menace qu'il représente ne serait crédible que s'il commençait par balayer devant sa propre porte. Car si les travailleurs immigrés d'Autriche ont toutes les raisons de craindre la chasse aux immigrés et les expulsions de la part d'un gouvernement avec des ministres d'extrême droite, ici, en France, c'est Chevènement, ministre de l'Intérieur du gouvernement Jospin, qui ordonne les expulsions.

Et plus généralement, les résolutions, même dénonçant clairement la démagogie raciste et xénophobe de Haider, ne dégagent pas tous ces hommes politiques, ayant dirigé ou dirigeant encore les divers gouvernements d'Europe, de la responsabilité d'avoir fait le lit de l'extrême droite par leur politique incapable de combattre le chômage, la misère et les inégalités. Sans parler de la corruption de certains d'entre eux. (Il est vrai qu'une partie de la droite a préféré rejoindre l'extrême droite pour protester contre... " l'ingérence inadmissible " dans les affaires intérieures de l'Autriche).

Toujours est-il que de nombreux projets de résolution, venant du PS, de la GUE-NGL, des Verts, du centre-droit ont circulé, avant que ceux qui les ont proposés les fondent en une résolution de compromis unique, assez inodore et incolore pour recueillir une majorité, toutefois condamnant clairement " toutes les déclarations insultantes, xénophobes et racistes faites depuis plusieurs années par Jörg Haider, président du parti libéral autrichien " et estimant que " l'admission du FPÖ au sein d'un gouvernement de coalition aurait pour effet de légitimer l'extrême droite en Europe ". Prise de position accompagnée d'une série de considérations oiseuses sur les " valeurs démocratiques européennes... ".

Seuls les groupes parlementaires constitués - ou encore un minimum de trente-deux députés - ont le droit de soumettre une résolution à l'ensemble du Parlement. Les députés de Lutte Ouvrière ont cependant tenu à présenter au moins devant le groupe GUE-NGL leur propre texte de protestation. Prenant position contre l'extrême droite et sa démagogie xénophobe non seulement en Autriche mais partout en Europe, ainsi que contre toutes les " forces politiques qui reprennent [sa] démagogie à leur compte ", le texte dénonçait également le fait que " l'accroissement des inégalités, le chômage, la misère et les craintes que tout cela entraîne ont fourni partout en Europe un terreau pour la propagation des idées d'extrême droite ".

La proposition a été discutée dans le groupe GUE-NGL sans être cependant reprise. Six députés européens, en plus de ceux de LO-LCR, se sont, par ailleurs, associés à la motion de protestation résumant les idées de la résolution que nous n'avions pas le droit de soumettre au vote.

Cela fait, et sans nous associer aux partis signataires d'une résolution de compromis qui ne nous convenait pas, nous avons fait le choix de la voter, seul choix que nous laissait le règlement du Parlement européen pour marquer notre solidarité avec ceux qui, au même moment, manifestaient en Autriche contre l'extrême droite,

Nous l'avons assortie d'une explication de vote, que nous publions ci-dessous, résumant les limites et les ambiguïtés de ce texte.

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