Italie - l'affaire d'Ustica : Une bavure qui fit 81 morts10/09/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/09/une-1626.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie - l'affaire d'Ustica : Une bavure qui fit 81 morts

Il aura fallu près de vingt ans, entre le 27 juin 1980 et ce 1er septembre, pour que des responsables militaires italiens soient renvoyés devant la cour d'assises pour l'affaire dite d'Ustica.

Ce jour de juin 1980, un avion DC-9 de la compagnie Itavia effectuant le trajet Bologne-Palerme avait explosé en vol au large de cette petite île proche de la Sicile, avec ses 81 occupants. Très rapidement il était apparu qu'au moment de la catastrophe, des avions de l'OTAN - américains, français ou anglais - évoluaient dans les environs à la poursuite d'un ou plusieurs avions libyens, eux aussi de passage dans l'espace aérien italien. L'hypothèse que l'avion de ligne ait été victime d'un combat aérien, entre les avions de chasse de l'OTAN et de la Libye, avait été rapidement évoquée, d'autant plus que, quelques jours plus tard, on avait retrouvé la carcasse d'un avion libyen écrasé dans les montagnes calabraises.

Mais voilà, depuis 1980, toutes les tentatives d'enquête des juges italiens se sont heurtées à un mur. Les divers services de renseignement ont opposé des fins de non-recevoir à toutes leurs demandes. Le " secret défense " était là qui voulait qu'aucune erreur n'ait été commise, que l'avion libyen était sans doute tombé par hasard, qu'il n'y avait aucun avion de l'OTAN dans les parages, et qu'il fallait chercher ailleurs les raisons de la chute du DC9 et de la mort de 81 personnes.

Pendant dix-neuf ans, l'enquête a donc suivi son cours malgré les démentis répétés des diverses autorités occidentales, de l'OTAN et des services militaires italiens eux-mêmes, niant l'évidence et faisant même disparaître un certain nombre de documents. Mais la patience d'un certain nombre de juges et l'obstination de l'association des familles des victimes ont abouti, le 1er septembre, à ce que le juge d'instruction Rosario Priore puisse estimer avoir suffisamment d'éléments pour décider de renvoyer neuf personnes devant la cour d'assises, dont quatre généraux italiens, accusés de " haute trahison ", et cinq autres personnes accusées de " faux témoignage ", pour avoir dissimulé à la justice les éléments dont elles disposaient.

On n'en a pas encore fini pour autant avec l'affaire d'Ustica : pour le moment, ces neuf personnes ne sont que certains responsables italiens du " mur du silence " élevé dans cette affaire. L'identité des pilotes et des responsables militaires qui ont pris leurs décisions au mépris de la sécurité des avions civils présents dans le secteur, ce qui s'est réellement passé ce jour-là au large de la Sicile, tout cela reste toujours couvert par le secret. Le gouvernement italien, embarrassé par la décision du juge, en est à expliquer qu'il va maintenant " étudier les voies à suivre pour rechercher, en collaboration avec les alliés de l'OTAN, l'établissement définitif de la vérité ". Mais l'OTAN continue à répondre officiellement qu'elle a aidé l'enquête autant qu'elle le pouvait, et le gouvernement français, par exemple, qu'il reste prêt à collaborer... comme il l'a fait jusqu'à présent ! Ce qui revient à dire que le mur du silence restera intact de ce côté-là.

On ne va tout de même pas se mettre à répondre aux questions des civils pour une simple " bavure " de 81 morts un jour où les militaires jouaient à la guerre dans le ciel de la Sicile ?

Partager