Rentrée scolaire : Les moyens continuent de manquer mais... Allègre est satisfait !10/09/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/09/une-1626.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Rentrée scolaire : Les moyens continuent de manquer mais... Allègre est satisfait !

A la veille de la rentrée des classes, Claude Allègre a étalé sa satisfaction lors d'une interview au " Grand Jury RTL-Le Monde ". " La France a le meilleur encadrement du monde au niveau du lycée : un enseignant pour 12,5 élèves ". Il brandit ce chiffre pour faire croire que finalement la plupart des classes ont bien peu d'élèves, ce qui est complètement faux.

En fait, de la maternelle (comme celle de Bagneux, dans les Hauts-de-Seine, occupée par des parents) au lycée (comme celui d'Aubervilliers, Jean-Pierre-Timbaud, à qui il manquait à la rentrée la bagatelle de 24 enseignants), le manque de moyens, qui avait provoqué les grèves de l'année passée, reste toujours criant.

La presse semble, ces jours derniers, venir au secours du ministre de l'Education nationale en matraquant qu'il y a une " baisse démographique ", 62 000 enfants scolarisés en moins - entre parenthèses, cette baisse ne touche pas les collèges qui, eux, accueillent 13 000 jeunes en plus - et que, malgré tout, le ministre a fait " l'effort " de créer 3 916 emplois.

Mais cette moyenne sur toute la France ne rend pas compte de la situation dans la plupart des endroits, surtout dans les villes ou banlieues populaires, là justement où il y a le plus de besoins.

Ainsi on a entendu tout de même parler de ces 40 écoles maternelles dans l'Ain qui ont plus de 28 élèves par classe. (Et même si elle correspondait à la réalité, telle que la connaissent les enseignants, cette moyenne dépasse largement le niveau qui permettrait à chaque élève de recevoir une éducation de qualité).

En Seine-Saint-Denis (région parisienne), malgré la deuxième série de postes supplémentaires obtenus grâce à la grève de 1998, les besoins restent immenses : 20 écoles élémentaires (ainsi les écoles élémentaires Sévigné à Sevran ou Pasteur à Gagny qui ont dû se mobiliser dès la rentrée) et 40 collèges et lycées sont en déficit d'enseignants. Dans les Hauts-de-Seine et les Yvelines, les classes restent surchargées. En Seine-et-Marne, il manquerait au moins une centaine d'instituteurs, de l'avis des parents et des syndicats enseignants.

Comme remède à tous les maux de l'Education, Allègre parle beaucoup de sa réforme qui doit commencer à rentrer en application cette année. " La grande chose, a-t-il déclaré à la radio à la veille de la rentrée, c'est quand même l'aide à l'élève. L'aide individualisée, c'est-à-dire des leçons particulières payées par l'Etat ! C'est une mutation historique ". Mais ce qu'il oublie de dire, c'est que cette prétendue " mutation historique " qu'il considère lui-même comme l'essentiel de sa réforme, l'aide aux élèves en difficulté, au collège par exemple, se fait pour l'essentiel avec des heures supplémentaires : 320 millions de francs d'heures supplémentaires ont été débloqués pour l'année scolaire 1999-2000, ce qui pourrait permettre d'embaucher presque 2 000 professeurs pour un an. Ce soutien nécessiterait effectivement la création de nombreux postes supplémentaires. Mais le ministre s'y refuse. Et, de toute façon, cette aide individualisée ne résoud en rien le problème des classes dont les effectifs sont trop importants, et dépassent parfois les nombres-plafonds d'élèves fixés par le ministère lui-même et qui sont pourtant déjà trop élevés !

Le reste de sa réforme " historique " consiste à réduire les programmes, ces allégements devant entrer en application en histoire-géographie et mathématiques. Ces allégements, contre lesquels les enseignants s'étaient insurgés l'an passé, ne peuvent en effet que pénaliser les élèves des milieux populaires.

En fait, le problème d'Allègre est de ne pas dépenser trop d'argent. Pour lui, comme pour le reste du gouvernement, l'heure est aux économies... quand il s'agit des services publics, de tout ce qui est utile, indispensable à la population. D'ailleurs, pour justifier le refus d'embaucher massivement du personnel dans l'Education nationale, on nous explique que son budget serait déjà énorme et dépasserait même pour la première fois 300 milliards de francs : 3,5 % de progression, une progression moindre que celle de l'an dernier, cela dit.

Mais qu'est-ce que 300 milliards de francs consacrés à l'éducation de la jeunesse, surtout comparés aux 200 milliards de subventions et aides que l'Etat offre au patronat ? Ces 200 milliards, qui représentent les deux tiers du budget de l'Education nationale, voilà ce qui pourrait permettre d'embaucher du personnel, dans l'enseignement ou dans d'autres services publics.

Mais pour arrêter les cadeaux au patronat afin d'embaucher, il ne faut compter ni sur Allègre, ni sur les autres membres du gouvernement. Cela, il faudra l'imposer !

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