Violences policières : un responsable jugé… pour une fois17/01/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/01/P5-1_Novembre_2020_manifestion_contre_la_loi_securite_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C123%2C2362%2C1452_crop_detail.jpg

Leur société

Violences policières : un responsable jugé… pour une fois

Au tribunal correctionnel de Lyon, les 11 et 12 janvier 2024, s’est déroulé le procès du commissaire-divisionnaire Rabah Souchi, jugé pour avoir ordonné, lors d’une manifestation des gilets jaunes à Nice en mars 2019, « une charge illégale car ni nécessaire ni proportionnée ».

Illustration - un responsable jugé… pour une fois

Renversée par un policier lors de cette charge, une militante d’Attac, Geneviève Legay, retraitée de 73 ans, avait été hospitalisée, victime d’une commotion cérébrale. Elle en garde encore aujourd’hui de lourdes séquelles, avec une perte totale de l’odorat, une perte partielle de l’audition et un trouble de l’équilibre.

Sans la détermination de cette militante et une importante mobilisation pour la soutenir, un tel procès n’aurait certainement pas pu avoir lieu. Comme à chaque fois, toutes les autorités politiques et judicaires ont en effet commencé par nier la moindre responsabilité de la police. Pour le maire de Nice Christian Estrosi et pour le procureur de la République, Geneviève Legay avait juste trébuché. Macron, lui, s’était contenté de déclarer, en substance, qu’elle n’aurait pas dû participer à une manifestation.

Dans un premier temps, l’enquête préliminaire avait été confiée à la sûreté départementale des Alpes-Maritimes, comptant parmi ses responsables la compagne du commissaire Souchi. À la suite de la révélation de ces liens par un article de Mediapart, et grâce aux vidéos filmées lors de la manifestation, montrant un policier poussant la militante d’Attac, une procédure a été engagée, aboutissant, fait rare, à la mise en cause du responsable chargé des unités de police lors de la manifestation.

Tout au long du procès, le comportement du commissaire Souchi a été critiqué à la fois par ses responsables, qui ont visiblement fait le choix de ne pas le couvrir, et par ses subordonnés. Le responsable d’une des trois colonnes de CRS, pourtant appelé à témoigner par la défense, a ainsi rapporté les propos de son supérieur : « C’est pas comme ça qu’on fait une charge, vous la refaites, il faut les défoncer. » Décrit comme autoritaire et violent, ce commissaire n’était manifestement pas particulièrement populaire au sein même de la police…

Le procureur a requis six mois d’emprisonnement avec sursis, alors que la peine encourue pourrait être de cinq ans de prison. La décision sera connue le 8 mars. Tout en se réjouissant d’une possible condamnation, Geneviève Legay a exprimé à juste titre des regrets : « J’aurais bien aimé avoir toute la chaîne [de commandement] ». Elle citait en particulier le préfet de l’époque, réputé pour ses méthodes répressives, en particulier à l’encontre des migrants. Toujours préfet, celui-ci sévit aujourd’hui dans les Hauts-de-France, où, entre autres états de services, il a envoyé la police charger les grévistes de l’entreprise Verbaudet en mai 2023.

Tous ces responsables-là ne sont pas près d’être jugés car, dans les périodes de crise et face aux mobilisations, savoir faire preuve sans état d’âme de brutalité à l’égard des manifestants et des travailleurs constitue une qualité très appréciée au sein de l’appareil d’État.

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