Mer Rouge : escalade guerrière20/12/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/12/2890.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Mer Rouge : escalade guerrière

En riposte aux drones lancés par les rebelles houthis du Yémen contre des navires de commerce occidentaux en mer Rouge, les États-Unis ont annoncé une coalition maritime internationale pour sécuriser cette autoroute de la mer.

Derrière les États-Unis, dix pays dont la France, l’Italie et le Royaume-Uni, mais ni l’Égypte ni l’Arabie saoudite pourtant voisines, viendraient jouer les Gardiens de la prospérité, en fait les shérifs de la mer Rouge. Cette annonce est un pas de plus dans l’escalade guerrière au Moyen-Orient.

L’attaque du Hamas, puis la riposte israélienne, impitoyable et disproportionnée, ont changé la donne dans la région. Elles ont modifié les relations entre les puissances régionales, Iran, Arabie saoudite, Égypte ou encore Turquie. Chacune cherche à défendre ses intérêts dans cette région rendue instable et explosive par les grandes manœuvres permanentes des puissances impérialistes.

Les rebelles houthis du Yémen, soutenus par l’Iran, sont en guerre depuis huit ans contre le gouvernement yéménite officiel, armé et financé, lui, par l’Arabie saoudite. Ils contrôlent la région autour de la capitale Sanaa et surtout le port d’Hodeida sur la mer Rouge, à proximité du détroit stratégique de Bab el-Mandab. Peu avant le 7 octobre, l’Arabie saoudite avait renoué des relations officielles avec l’Iran et cherchait à mettre un terme à cette guerre, terriblement meurtrière (400 000 morts !) et sans issue. Elle s’apprêtait aussi à signer un accord politique et commercial avec Israël. Le redémarrage de la guerre en Palestine a interrompu les deux processus. L’Arabie saoudite ne peut plus, pour l’instant, pactiser avec Israël, tandis que l’Iran et ses alliés, le Hezbollah libanais ou les Houthis yéménites, apportent leur soutien au Hamas et dénoncent l’écrasement des Gazaouis.

Pour autant, malgré la propagande des dirigeants occidentaux et de leurs perroquets des médias, l’Iran et ses alliés ne sont pas les plus va-t-en-guerre. Au Liban, le Hezbollah retient ses coups depuis deux mois. Quant aux tirs de drones ou de roquettes contre des cargos occidentaux, ils sont surtout un moyen pour les Houthis de montrer qu’ils sont capables de perturber cette voie maritime majeure où passent 12 % du commerce mondial et 60 % des importation européennes. Si quatre grandes compagnies maritimes, Maersk, CMA-CGM, Hapag-Lloyd et MSC ont décidé de ne plus emprunter cette voie pour rejoindre l’Europe mais de contourner l’Afrique, c’est autant pour des raisons de gros sous que de sécurité. Comme toujours dans l’économie capitaliste, chaque aléa est utilisé par certains acteurs pour augmenter leurs profits. Ainsi les compagnies d’assurance ont-elles immédiatement décuplé les primes sur la mer Rouge, amenant des transporteurs à préférer le contournement de l’Afrique, même si cela ajoute dix jours de navigation pour un voyage Chine-Europe et quelques frais supplémentaires.

Toute l’industrie fonctionnant en flux tendu, ces délais se répercuteront dans l’économie. Mais les surcoûts seront en fin de compte payés par les consommateurs tandis que les compagnies maritimes augmenteront leurs prix et leurs profits. Le cours boursier de Hapag-Lloyd a d’ailleurs grimpé de 9,4 % en une seule journée.

L’annonce de cette coalition navale occidentale illustre comment les grandes puissances veulent continuer à imposer leur loi partout sur la planète. Quand les intérêts commerciaux sont en jeu, cela compte bien plus que des milliers de morts à Gaza. Et tant pis si cela aiguise encore les conflits dans une région qui n’en manque déjà pas.

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