Méditerranée : le cimetière des migrants22/11/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/11/2886.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Méditerranée : le cimetière des migrants

L’Ocean Viking, un des navires de sauvetage affrétés par l’ONG SOS Méditerranée, est de nouveau condamné par le gouvernement italien à rester au port pendant vingt jours et à une amende de 3 300 euros. Son tort est en fait d’avoir sauvé la vie de 128 migrants !

Le gouvernement italien, comme l’ensemble des pays européens, multiplie les obstacles juridiques pour empêcher les navires d’aller au secours des migrants qui tentent de traverser la Méditerranée sur des bateaux de fortune. Le décret Piantedosi (du nom du ministre de l’Intérieur italien) oblige, depuis un an, les bateaux à se rendre « sans délai », une fois le premier sauvetage effectué, dans le port désigné par les autorités italiennes.

Après avoir sauvé 33 personnes, l’Ocean Viking devait ainsi rejoindre le port d’Ortona mais, en chemin, il a reçu deux autres appels de détresse, dont celui d’un bateau où l’un des passagers avait été grièvement brûlé et intoxiqué par des émanations d’essence. L’Ocean Viking les a donc secourus et c’est aujourd’hui ce que lui reproche le gouvernement italien. De plus, celui-ci dirige les bateaux de secours vers des ports de plus en plus distants des zones d’intervention, de manière à en éloigner les sauveteurs. Cela coûte très cher en carburant aux associations et cela ralentit leur mission de sauvetage.

Le gouvernement italien fait ainsi ouvertement ce que tous les pays riches d’Europe font plus hypocritement. Depuis sa création, Frontex, l’agence européenne de gardes-frontières, s’est donné pour mission de refouler les migrants, et peu importe si c’est vers des pays comme la Libye, où ils sont livrés à l’esclavage et aux mauvais traitements. Pour éviter que les migrants n’atteignent leur pays, les gouvernements préfèrent les voir périr en mer, si possible silencieusement. En recensant toutes les atteintes au droit maritime, qui oblige les bateaux à porter secours aux naufragés ou les avions qui survolent la Méditerranée à signaler les embarcations en perdition, les sauveteurs comme ceux de l’Ocean Viking les dérangent.

L’année 2023 a été particulièrement meurtrière. Au moins 2 188 personnes sont mortes depuis le début de l’année, selon l’Organisation internationale des migrations. C’est 50 % de plus que l’an dernier, et ce ne sont que ceux qui ont été officiellement recensés.

Face à ces morts qui se multiplient, José Benavente, le fondateur de Pilotes volontaires, une association qui cherche les embarcations en difficulté, a déclaré : « Lorsqu’on survole la Méditerranée, on n’est pas au-dessus d’un cimetière. On est littéralement au-dessus d’une fosse commune. »

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