Bassin industriel de Saint-Nazaire : on y meurt plus jeune01/11/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/11/2883.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Bassin industriel de Saint-Nazaire : on y meurt plus jeune

Saint-Nazaire et l’estuaire de la Loire constituent un bassin industriel comprenant de fortes concentrations ouvrières, dans l’aéronautique, la construction navale, les ports et docks, la chimie ou l’agroalimentaire. Depuis longtemps, médecins et scientifiques y constatent des chiffres de mortalité alarmants.

Dans les dernières décennies, le scandale de l’amiante, que les industriels ont longtemps caché et nié, y a fait de nombreuses victimes. Mais, alors que l’exposition à l’amiante a cessé officiellement dans les années 1990, les chiffres de la mortalité ne s’améliorent pas, et même continuent de se dégrader.

Sous la pression de syndicats ouvriers et d’associations de quartier, des études statistiques ont été lancées. En 2021, elles révélaient une surmortalité de 28 % par cancers des hommes et des femmes de la région ­nazairienne, par rapport au chiffre national.

Il y a quelques jours, une étude de l’Observatoire régional de la santé (ORS) signalait que le taux de mortalité avant 65 ans des habitants de la région était supérieur à la moyenne nationale de 42 % pour les hommes et de 9 % pour les femmes.

Les pouvoirs publics, qui ne peuvent pas contester ces chiffres, se disent incapables de les expliquer, sauf en évoquant le tabagisme et l’alcoolisme, alors même qu’ils sont dans l’impossibilité de le démontrer par une comparaison avec les chiffres nationaux.

Par contre, personne ne peut ignorer que des entreprises comme Airbus, Chantiers de l’Atlantique, Total, Cargill ou Yara et leurs sous-traitants sont d’importants émetteurs de polluants tels que les fumées de soudure, les particules fines et ultrafines, les métaux lourds (chrome 6, nickel), les solvants, les composés organiques volatils, la silice cristalline, l’ammoniaque, les pesticides ou les raticides.

Et même si « l’effet cocktail » de ces substances – ce terme indiquant que les effets nocifs de ces polluants ne s’additionnent pas simplement, mais se multiplient – est pointé par les scientifiques, aucune étude sérieuse n’est envisagée pour le mesurer un tant soit peu.

Évidemment, les travailleurs des entreprises concernées sont les premières victimes de ces poisons, et ils le sont encore souvent une deuxième fois avec l’ensemble des riverains de ces sites industriels. Et cela alors même que, contrairement à des régions en cuvette comme celles de Grenoble ou de Toulouse, l’estuaire de la Loire est soumis aux vents de l’océan Atlantique qui balaient régulièrement l’atmosphère.

Alors, faute de pouvoir étudier de près ces sources évidentes de pollution, l’ORS avait demandé aux industriels locaux de fournir des renseignements sur leurs potentielles émissions de polluants. Mais, bien que les patrons concernés aient pu, sans contrôle, affirmer ce qu’ils voulaient, même pas la moitié d’entre eux ont daigné répondre à ces questions.

Ce qui n’empêche pas la préfecture de Loire-Atlan­tique de renchérir et rechigner en affirmant que les 150 000 euros qu’aurait coûtés cette étude encore très fragmentaire, c’est vraiment beaucoup. Alors même qu’au regard des profits de ces entreprises – pour peu qu’elles y aient contribué – cela ne représente qu’une goutte de mazout !

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