Niger : l’armée française forcée de plier bagage27/09/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/09/2878.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Niger : l’armée française forcée de plier bagage

L’annonce par Emmanuel Macron du départ des troupes françaises du Niger et du retour de son ambassadeur à Paris a déclenché des manifestations d’enthousiasme à Niamey. L’arrogance du président français, qui prétendait depuis deux mois ignorer les injonctions de la junte à la tête du pays, n’a fait qu’exacerber le ressentiment de la population et de la jeunesse contre l’ancienne puissance coloniale.

Les militaires dirigés par le général Tiani ont renversé le 26 juillet dernier le président Mohamed Bazoum, grand ami de la France. Macron avait aussitôt déclaré qu’il ne reconnaissait pas les nouvelles autorités du pays et ne recevrait de consignes que de Mohamed Bazoum, retenu prisonnier. Dans le même temps, il activait les dirigeants des pays africains alliés de la France, comme la Côte d’Ivoire, pour que la Cedeao, l’organisation régionale, prenne des mesures en vue d’une intervention militaire et déclenche des sanctions économiques contre le Niger. Son intransigeance vis-à-vis de la junte nigérienne avait pour but de pousser la ­Cedeao à passer des paroles aux actes, et de la mobilisation à l’opération militaire.

Cette attitude s’est soldée par un fiasco. Le président du Nigeria, Bola Tinubu, dirigeant actuel de la Cedeao, initialement chaud partisan de l’intervention militaire, s’est rapidement calmé devant la levée de boucliers que cette perspective déclenchait dans son propre pays. D’autres pays voisins du Niger, comme l’Algérie et le Tchad, se sont déclarés opposés à toute aventure militaire. Dans le camp des grandes puissances, les États-Unis, épargnés par la junte, ont pris langue avec les nouvelles autorités que la France boudait et tentent aujourd’hui de faire accepter par la Cedeao un compromis avec celles-ci. Au sein même de l’Union Européenne, la France s’est retrouvée totalement isolée.

Ce bras de fer déclenché par Emmanuel Macron aura finalement eu pour seul effet d’accroître les souffrances de la population nigérienne. Les sanctions économiques imposées par la Cedeao, qui restent aujourd’hui encore en application, ont des conséquences dramatiques. Les prix des produits de base explosent, quand ceux-ci ne disparaissent pas purement et simplement de la circulation. Les médicaments font défaut. L’électricité, en provenance du Nigeria, est quasiment coupée. Contrairement à ce que pensaient sans doute les dirigeants français dans leurs calculs criminels, ce blocus n’a pas dressé la population contre la junte, mais a aggravé son hostilité à la présence française.

Cet échec cuisant subi au Niger, après ceux intervenus au Mali et au Burkina Faso, ne changera certainement rien à la politique des dirigeants de l’impérialisme français. Après avoir dit une fois de plus qu’il n’y avait plus de Françafrique, Macron n’a rien eu de plus pressé que de montrer comment il allait persister dans la même voie. Il a affirmé contre toute évidence que l’opération Barkhane avait été un succès alors que, pendant les huit ans qu’elle a duré, le djihadisme s’est répandu du seul Mali à tous les pays de la région. Il a dit que la France continuerait à travailler avec les pays qui en font la demande, ce qui veut dire en premier lieu avec ceux où l’armée française possède des bases, la Côte-d’Ivoire, le Sénégal, le Gabon ou le Tchad. Il a même laissé entendre que le Niger regretterait la présence des troupes françaises, alors que sa population descend dans la rue pour applaudir leur départ.

Cette politique de présence militaire ne prendra pas fin avec le départ des troupes françaises du Niger, pas plus que le pillage de l’Afrique par les trusts capitalistes français. Comment s’étonner si elle continue de susciter une haine farouche ?

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