Arkema-Daikin – Pierre-Bénite : empoisonnés à petit feu14/06/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/06/2863.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Arkema-Daikin – Pierre-Bénite : empoisonnés à petit feu

Une nouvelle enquête journalistique montre la responsabilité directe d’Arkema et de Daikin sur le site de Pierre-Bénite, dans le Rhône, dans la contamination aux PFAS (polluants éternels), et cela depuis plus de vingt ans.

Cette contamination concerne les travailleurs de ces deux entreprises, mais aussi les populations des communes environnantes. En 2008, les travailleurs de Daikin présentaient un taux de PFOA dans le sang (un perfluoré utilisé entre autres dans le revêtement anti-adhésif d’ustensiles de cuisson) 1 000 fois supérieur à la moyenne nationale. Et, huit ans après l’arrêt de cette production, le taux de contamination était encore 400 fois supérieur à la moyenne.

À Arkema, c’est un autre perfluoré, le PFNA, qui a contaminé les travailleurs, en particulier ceux de l’atelier Kynar où se faisait cette production. En 2022, six ans après l’arrêt de ce produit, les travailleurs concernés présentaient encore un taux de contamination dix-sept fois supérieur à la moyenne. Dans cet atelier, c’est seulement sous la pression des travailleurs que la direction a finalement consenti à mettre en place des tests de contrôle.

À l’époque, personne n’imaginait que la pollution aux perfluorés s’étendait aussi très largement à la population d’un grand nombre de communes environnantes, au point que des mesures d’interdiction de consommation d’œufs ou de volaille ont été prises. Et les analyses sanguines faites sur des riverains démontrent toutes des taux de PFAS anormalement élevés.

On estime aujourd’hui que plus de 200 000 personnes seraient contaminées par le rejet dans la nature, et en particulier dans le Rhône, des résidus de production qui représentent 3,5 tonnes par an pour Arkema. L’eau potable de plusieurs communes est en effet puisée dans ce fleuve.

Alors l’inquiétude est forte parmi les riverains, qui se demandent à quelles conséquences pour leur santé ils doivent s’attendre, ainsi que parmi les travailleurs, notamment ceux qui ont manipulé ces produits sans aucune protection pendant des années. Mais les plus jeunes s’interrogent aussi sur les risques qu’ils encourent.

Les directions d’Arkema et de Daikin expliquent aujourd’hui qu’elles n’utilisent désormais que des PFAS « non bioaccumulables » et qu’elles ont mis en place des systèmes de filtration pour en relâcher le moins possible dans l’environnement. Mais comment leur faire confiance ? Pendant des décennies, alors que la toxicité et la persistance de ces molécules étaient connues, elles n’ont rien fait. Elles se retranchent derrière l’absence de législation sur ces molécules pour justifier leur inaction. Elles bénéficient aussi de la complicité, au moins passive, des pouvoirs publics, toujours plus prompts à fermer les yeux sur les agissements des industriels qu’à se soucier de la santé de la population.

Une chose est certaine : la population ne pourra compter ni sur les uns ni sur les autres pour assurer sa santé et sa sécurité.

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