Michelin : le patron à l’offensive12/10/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/10/2515.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Michelin : le patron à l’offensive

Michelin a été encensé par les grands médias pour avoir fait passer des accords de réactivité « exemplaires » sur deux de ses sites, à Roanne (Loire) en mai 2015 et à la Roche-sur-Yon (Vendée) en avril 2016. Mais ces accords, qui prévoient notamment la généralisation du travail le week-end et la flexibilisation des horaires en fonction de la demande des clients, n’ont été obtenus que par le chantage à l’emploi.

On a pu voir à la télévision le directeur général de Michelin se féliciter du rôle de son entreprise dans le sauvetage de l’emploi en France. Les journalistes n’ont pas cru bon de rappeler les fermetures de Sodemeca à Lille, des sites de Joué-lès-Tours et de Poitiers depuis 2007, pas plus qu’ils n’ont signalé que les embauches ne s’effectuent que pour remplacer les retraités – au rythme d’un recrutement pour trois départs. Une radio a expliqué qu’une machine ultra-moderne avait été installée à Roanne, alors qu’il s’agit d’une machine vieille de vingt ans, et qui a simplement été importée d’un site fermé par Michelin.

Dans son offensive, Michelin a aussi pu s’appuyer sur la passivité des syndicats. À Roanne, l’ensemble des syndicats, y compris la CGT, ont signé l’accord pour « sauver l’entreprise ».

La méthode miracle de Michelin est simple, et tout sauf inédite : c’est le chantage à l’emploi. Chaque site est présenté comme trop peu rentable et donc menacé de fermeture… à moins de signer un accord de compétitivité. La direction organise des réunions avec salariés et syndicats, pour qu’ils se chargent eux-mêmes de suggérer les sacrifices à faire pour maintenir l’emploi sur le site. Ainsi à Cholet, sur un atelier de 200 personnes, le patron a détaché 40 ouvriers, chefs et cadres pendant une semaine pour les former à ces groupes de travail. Ensuite, durant trois mois, cette équipe a été détachée deux heures par semaine pour une réunion avec la direction, et deux heures de plus pour aller convaincre ses camarades de travail.

Mais l’offensive de communication de Michelin, que ce soit en externe ou en interne, ne saurait cacher les conséquences. Des conditions de travail aggravées, des jours de congés payés fixés au gré des besoins du patron : voilà ce que doivent subir les salariés, sans oublier plus d’une centaine de suppressions de postes. Le site de Roanne va passer du 4×8 au 5×8, et celui de La Roche-sur-Yon du 3×8 au 4×8. Les ouvriers devront travailler jusqu’à seize dimanches par an en cas de pic et, à l’inverse, dans les phases de creux, piocher des congés dans un compteur alimenté par les journées travaillées le week-end.

Le groupe Michelin compte 125 000 salariés dans le monde, dont environ 20 000 en France. Il a dégagé l’an passé une marge opérationnelle record de 12 milliards d’euros. Mais ces profits ne sont pas assez pour la famille Michelin, qui voudrait imposer dans toutes les usines du pays les mêmes reculs qu’à Roanne et la Roche-sur-Yon. Mais, à force de tirer sur la corde, elle finit par casser.

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