Cahuzac : procès d’un politicien ordinaire07/09/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/09/2510.jpg.445x577_q85_box-0%2C62%2C822%2C1128_crop_detail.jpg

Leur société

Cahuzac : procès d’un politicien ordinaire

Lundi 5 septembre s’est ouvert le procès de Jérôme Cahuzac pour fraude fiscale, blanchiment et, cerise sur le gâteau, déclaration mensongère de patrimoine.

La biographie de l’ancien ministre du Budget du gouvernement Hollande-Ayrault résume l’ascension typique d’un notable avide d’argent, devenu serviteur zélé de la bourgeoisie dans les plus hautes sphères de l’État. Ancien cardiologue formé aux frais de l’hôpital public, il s’est enrichi ensuite dans sa propre clinique privée spécialisée dans les implants capillaires. Devenu conseiller au ministère de la Santé de Claude Évin, il y joua le rôle d’entremetteur entre laboratoires pharmaceutiques et hauts cadres de l’administration présentant les dossiers au ministre, son carnet d’adresses lui permettant ensuite d’accumuler des revenus confortables en tant que consultant.

Élu député, puis président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, sa carte du Parti socialiste en poche, Cahuzac avait le profil idéal pour devenir ministre du Budget dans le gouvernement Ayrault formé au lendemain de l’élection de Hollande en 2012. Se présentant comme le pourfendeur de la fraude fiscale, il avait surtout planifié au nom de la rigueur des coupes claires dans tous les budgets susceptibles de servir aux classes populaires afin de financer les cadeaux de Hollande au patronat.

La chute allait être brutale. Malgré ses dénégations répétées pendant des mois, Cahuzac dut se résoudre à démissionner en mars 2013 après que la justice eut ouvert une information judiciaire sur sa détention d’un compte à l’étranger.

À l’ouverture de son procès, l’ancien ministre a présenté une nouvelle défense devant les juges. Les sommes rondelettes déposées sur son compte en Suisse, déplacées ensuite vers Singapour par l’intermédiaire d’une société-écran basée aux Seychelles et via un intermédiaire de Dubaï, n’auraient pas été une fraude fiscale somme toute ordinaire dans les milieux de la petite bourgeoisie aisée, mais un acte militant. Il se serait sacrifié, accumulant des fonds afin de financer les ambitions politiques de Michel Rocard. Ce dernier, ayant eu la politesse de décéder au mois de juillet dernier, ne pourra plus venir contredire Cahuzac.

Le milieu politique, par la voix du Premier ministre, a réagi comme lors de sa démission du gouvernement, en accusant Cahuzac de mentir à nouveau. Pourtant savoir bien mentir est une qualité de base indispensable dans le cadre du système politique actuel. Aucun de ses anciens amis ne lui a d’ailleurs reproché la politique qu’il a menée au long de sa carrière. Gérer au mieux les affaires de la bourgeoisie à tous les niveaux de l’appareil d’État, en en profitant parfois au passage pour son compte personnel, justifier toutes les mesures d’austérité contre la population au nom de la bonne gestion, n’est-ce pas le rôle fondamental que les politiciens assument à tour de rôle ?

Condamné ou pas au final, Cahuzac aura fait sa part du travail, et sans aucun doute au passage mis suffisamment de côté pour voir venir.

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