Loi travail et saisonniers : promesses vides12/07/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/07/2502.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Loi travail et saisonniers : promesses vides

En ce début d’été, alors que des centaines de milliers de travailleurs entament leur saison, la ministre du Travail se targue d’avoir un plan en leur faveur. Il y aurait des dispositions les concernant dans sa loi travail, en cours d’adoption définitive à coups d’article 49-3.

Ce texte parle en effet de négocier la reconduction d’année en année des contrats des travailleurs saisonniers et de prendre en compte leur ancienneté. Les travailleurs saisonniers, dont le nombre est évalué à plus d’un million par la ministre et à deux millions par tous les autres, retournent en effet souvent faire le même travail, chez le même patron, plusieurs années de suite. Ils sont payés la plupart du temps au salaire minimum ou bien en dessous de leur qualification.

Jusqu’à aujourd’hui, le renouvellement du contrat pour l’année suivante, quand il avait lieu, était verbal. Le travailleur avait la promesse d’avoir quelques semaines de salaire, pour un emploi et à des conditions qu’il connaissait ; le patron avait la certitude d’avoir un travailleur déjà qualifié, à moindre prix. La loi travail change certes cela en contrat écrit pluriannuel, mais sans dire de quelles clauses il s’accompagnerait, ni quelles possibilités de rupture elle laisserait aux patrons. Elle ne mentionne aucune augmentation de salaire liée à l’ancienneté ou à la qualification. C’est-à-dire qu’elle n’apporte en fait que très peu de chose, presque rien, aux travailleurs. En revanche les patrons y trouvent leur compte, car ils demandaient depuis longtemps de pouvoir s’assurer d’employer les mêmes travailleurs sans avoir à refaire toutes les démarches administratives chaque année, de disposer de saisonniers permanents aux salaires éternellement bloqués.

Le mensonge est encore plus flagrant en ce qui concerne la prime de fin de contrat, une prime que touchent tous les travailleurs précaires… sauf les saisonniers. Le problème est certes mentionné, mais simplement pour dire qu’une commission va l’étudier. La loi ne dit rien sur le paiement des jours fériés, refusé aux saisonniers, ni sur les heures supplémentaires non payées qui sont monnaie courante dans ce secteur.

Quant aux conditions d’hébergement de travailleurs parfois très éloignés de chez eux, il n’en est pas fait mention. Elles sont pourtant souvent indignes, comme l’avait montré la mort d’un couple de saisonniers, tués dans leur sommeil par l’incendie de leur camion, en plein hiver, dans une station de sports d’hiver. Au rappel de ces faits la ministre avait répondu, il y a quelques mois, qu’elle demanderait aux préfets de veiller au grain. Au même moment, des députés demandaient que les employeurs puissent avoir une dérogation afin de loger les saisonniers à 12 par chambre au lieu de 6, tout en diminuant le nombre de sanitaires et la surface occupée.

Malgré les bas salaires, malgré les conditions d’hébergement, d’année en année le nombre de travailleurs saisonniers augmente. Ce n’est pas parce qu’on ouvre plus de parcs de loisirs, de colonies de vacances ou d’hectares de vignes à vendanger. C’est parce que ce statut permet au patronat d’exploiter un peu plus les travailleurs. Et, loin de lui mettre des bâtons dans les roues, la loi travail va encore lui faciliter les choses.

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