Haïti : la lutte pour le salaire minimum continue12/07/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/07/2502.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Haïti : la lutte pour le salaire minimum continue

Cet article est extrait de l’éditorial du Pouvoir aux travailleurs, journal édité par l’Organisation des travailleurs révolutionnaires (OTR-UCI) d’Haïti.

Sous la pression de la rue, le gouvernement Privert/Jean-Charles a fini par publier un décret annonçant l’ajustement salarial [à 300 gourdes, soit une augmentation de 25 % du salaire minimum] tel que proposé par le Conseil supérieur des salaires et applicable rétroactivement à partir du 1er mai. Les différentes interventions sur la zone industrielle et dans la presse, suivies des manifestations du début du mois de mai (...) pour exiger une revalorisation du salaire minimum journalier à 500 gourdes, ont été payantes.

Les travailleurs l’ont ressenti comme une victoire, et ils ont raison, surtout quand on a constaté l’acharnement des patrons de la sous-traitance, qui bavaient dans la presse pour expliquer que cet ajustement de 25 % dans leur secteur était trop élevé. L’opinion publique s’est fait une petite idée de la cupidité de ces exploiteurs qui touchent leurs commandes en dollars et paient en gourdes, la monnaie locale en dégringolade continue.

Ayant perdu la première manche de cette bataille, les patrons de la sous-traitance, avec la complicité de leurs valets au gouvernement, ont multiplié les subterfuges de toutes sortes sur le terrain, pour fouler aux pieds la décision de revaloriser le salaire minimum. Certains ont augmenté les quotas de la journée, d’autres procèdent à des révocations, pour contraindre une dizaine d’ouvriers à faire le travail de vingt autres, par exemple. (...) Alors que le salaire de base a été augmenté de 25 %, les ouvriers de Baker sont étonnés de constater qu’ils touchent paradoxalement moins qu’avant. C’est le cas dans plusieurs autres entreprises, où les patrons poussent l’arrogance et le cynisme jusqu’à couper dans les salaires des travailleurs, comme pour les sanctionner d’avoir manifesté pour exiger le relèvement du salaire minimum. (...)

[Dans plusieurs entreprises] du parc Sonapi, les travailleurs se sont battus pendant plus de quinze jours pour arracher l’application de l’ajustement salarial. À Sisa, à Tabarre, pendant plus de deux semaines, ils ont également tenu tête au patron, qui a fait feu de tout bois pour tenter de les diviser et de les décourager. La situation est pareille dans plusieurs autres entreprises de la zone industrielle, comme Premium, où les travailleurs opposent la résistance aux manœuvres des patrons de ne pas appliquer l’ajustement salarial. (...)

Au parc Sonapi, depuis l’annonce officielle de l’ajustement dans la presse, les travailleurs, pendant les pauses, s’attroupent pour discuter des bas salaires, de la cherté de la vie, des conditions de travail, et également des événements politiques qui dominent l’actualité. Les discussions sont vives et entraînent de plus en plus de travailleurs. Les syndicats, réduits comme peau de chagrin, reprennent du poil de la bête, recrutent, animent les débats collectifs, se posent en dirigeants de grèves comme c’est le cas à Sisa, alors qu’ils n’y ont pas fait appel.

Après les manifestations de rue, les travailleurs continuent la lutte au sein des entreprises, là où ça fait mal aux patrons, qui ne se sont pas gênés de confier à la presse avoir perdu des millions de dollars en raison de l’arrêt de la production pendant les jours de manifestation. (…)

Ces protestations, grèves et arrêts de travail sporadiques doivent s’étendre à toute la zone industrielle, pour converger en un vaste mouvement en vue de faire appliquer les 25 % d’ajustement salarial et arracher aussi les accompagnements sociaux promis depuis plusieurs années : la prise en charge des frais de transport, de nourriture pendant la journée de travail, de l’assurance-maladie, etc.

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