Pesticides tueurs d’abeilles : interdits… sauf dérogation29/06/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/06/2500.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Pesticides tueurs d’abeilles : interdits… sauf dérogation

Lors de la troisième lecture du projet de loi sur la biodiversité, les députés ont fini par interdire l’utilisation des néonicotinoïdes, ces insecticides considérés comme très nocifs pour les abeilles, à partir de septembre 2018. Mais le délai avant interdiction pourrait se prolonger, car les députés laissent la possibilité de dérogations accordées par le gouvernement jusqu’en juillet 2020.

La nocivité de ces insecticides pour les abeilles et les insectes pollinisateurs sauvages est pourtant connue depuis des années. Produits par des multinationales comme Syngenta et Bayer, ils sont employés à grande échelle depuis le milieu des années 1990. Ils ne sont pas apportés par pulvérisation sur les plantes en cas de prolifération d’insectes nuisibles, mais intégrés à l’enrobage des semences de manière préventive, en particulier dans le cas du blé, du maïs ou de la betterave. Les molécules actives sont absorbées par les racines et circulent ensuite dans toute la plante, y compris dans le pollen et le nectar dont se nourrissent les abeilles.

Ces insecticides agissent sur les abeilles à très petites doses, ne les tuant pas forcément, mais altérant leur sens de l’orientation, ce qui les rend incapables de retrouver leur ruche après le butinage. Les apiculteurs et les organisations écologiques qui étudient le sujet considèrent qu’ils sont la principale cause de la disparition annuelle de 300 000 colonies d’abeilles en France. La technique d’enrobage des semences est d’autant plus nocive que seuls 10 % de l’insecticide sont absorbés par la plante. Les 90 % restant dans le sol peuvent y persister plusieurs années, ou être emportés par les eaux de pluie et contaminer d’autres parcelles.

Les apiculteurs et les organisations écologiques tentent depuis des années de faire interdire les néonicotinoïdes . Mais, que ce soit au niveau national ou au niveau européen, la législation avance à pas de tortue et n’a pour le moment aucun effet ! Même si certaines de ces substances ont déjà vu leur usage restreint au niveau européen depuis 2013, la vente de ce type d’insecticides a continué à progresser en France. Le tonnage vendu des cinq principaux néonicotinoïdes a augmenté de plus de 30 % entre 2013 et 2014.

C’est l’Union nationale de l’apiculture qui a révélé ces chiffres officiels, après s’être donné bien du mal pour les obtenir. Les services du ministère de l’Agriculture sont en effet particulièrement discrets sur le sujet. Ils refusent d’ailleurs de lui communiquer les tonnages vendus en 2015, le détail des traitements par type de culture ou encore les superficies concernées. Ils ont même refusé d’indiquer quelle a été la position de la France, lorsqu’en juillet et novembre 2015 l’Union européenne a autorisé deux nouveaux insecticides apparentés aux néonicotinoïdes.

Pour justifier ces refus, les services du ministère ont expliqué que divulguer de telles informations pourrait « porter atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France », ou qu’il fallait d’abord « s’assurer qu’elles ne trahissent aucun secret commercial des acteurs de la filière ». Les capitalistes de l’industrie des pesticides et les gros exploitants céréaliers et betteraviers peuvent être tranquilles : ils ont des amis qui pensent bien à eux au ministère de l’Agriculture et au Parlement.

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