Rwanda : à quand le jugement de l’impérialisme français ?11/05/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/05/2493.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Rwanda : à quand le jugement de l’impérialisme français ?

Deux Rwandais accusés d’avoir participé au massacre de centaines de Tutsis en avril 1994 sont jugés depuis mardi 10 mai à Paris. Il s’agit du maire et de l’ancien maire de la commune de Kabarondo.

Des témoins ont rapporté comment Octavien Ngenzi, le maire, était allé chercher en voiture les Tutsis de la localité pour leur dire de s’abriter dans l’église, alors que les tueries ensanglantaient tout le pays. C’était en fait pour les livrer aux miliciens hutus, les Interahamwe, qui attaquèrent l’église avec le renfort de gendarmes, assassinant les Tutsis à coup de machette. Le second accusé, Tito Barahira, supervisait les tueries en brandissant sa lance. Il n’y eut que quelques rares survivants.

Si ces crimes sont aujourd’hui jugés, c’est grâce à l’acharnement du Comité pour la vérité et la justice au Rwanda, qui a retrouvé la trace d’une cinquantaine de génocidaires réfugiés en France et a déposé plainte contre eux. L’un d’eux, Pascal Simbikangwa, ancien officier de la garde présidentielle rwandaise, a été condamné à 25 ans de prison en mars 2014.

Mais, dans ces procès, il manque un accusé, et non des moindres : l’État français, dont les responsables ont à l’époque protégé et armé le régime rwandais. Lorsque le génocide survint, le gouvernement français était depuis de longues années derrière les massacreurs. Le Rwanda, situé à la frontière des régions riches en minerais du Congo voisin, était tombé dans la zone d’influence française après avoir été colonisé par la Belgique. Son président, Habyarimana, attisait la haine contre les Tutsis pour garder le pouvoir et permettre à son clan de piller le pays. À chaque fois qu’il eut besoin de l’armée française pour sauver son régime, Paris répondit présent.

À partir de 1990, quand le génocide a commencé à se préparer, les officiers français continuèrent à former et à armer les futurs tueurs. Le président Mitterrand sut fermer les yeux sur les pogroms locaux de plus en plus fréquents, la constitution de milices ou la propagande assassine de Radio mille collines. Lorsque les massacres se déchaînèrent, après l’assassinat d’Habyarimana, l’armée française laissa faire, se contentant d’évacuer les Européens… et la famille d’Habyarimana. Elle n’intervint qu’après l’effondrement du régime génocidaire sous les coups du Front patriotique rwandais (FPR), et aida alors les assassins à s’enfuir vers le Congo, sous prétexte d’opération humanitaire.

C’est avec cette protection que le régime a pu faire 800 000 morts. Les dirigeants français ont du sang sur les mains, au même titre que les criminels aujourd’hui jugés.

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