Inde : les femmes ne veulent plus vivre sous la menace de viol02/09/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/09/2457.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Inde : les femmes ne veulent plus vivre sous la menace de viol

En dénonçant devant la Cour suprême d’Inde l’injustice qui touche sa famille, méprisée parce qu’elle est issue d’une caste dite inférieure « dalit » ou intouchable, une jeune femme a fait connaître son sort, qui est loin d’être une exception.

Sous prétexte que leur frère s’est enfui de leur village dans l’État d’Uttar Pradesh, avec la fille d’une famille influente, un « conseil de village » – en fait un groupe d’hommes de haute caste voulant se venger – les a condamnées, sa jeune sœur et elle, à être violées en public et à être exposées nues. Heureusement elles se sont enfuies du village avant que cette abomination soit mise en œuvre, mais leur maison a été pillée.

En Inde, qui est souvent présentée comme la plus grande démocratie du monde, la violence fait partie du quotidien des masses pauvres. Elle s’exerce en particulier à l’encontre des membres des basses castes traités comme des sous-hommes ou à l’encontre des femmes réduites au servage, vendues lors de mariages arrangés, abusées par tous et le plus souvent en toute impunité par les propriétaires terriens ou les fils de bonne famille.

Ces injustices sont perpétuées le plus souvent avec la complicité des autorités. Dans le cas de ce village d’Uttar Pradesh, les responsables de la police ont fait semblant de ne rien voir puisque les « conseils de village » n’ont pas d’existence légale et que par conséquent leurs décisions ne sont pas des jugements à proprement parler. De la même façon, si le système des castes a été aboli officiellement en 1950 peu après l’indépendance de l’Inde, en fait cette hiérarchie sociale continue de s’imposer dans la vie quotidienne d’une grande partie de la population.

Les femmes sont des victimes toutes désignées d’une pauvreté endémique dans une société de classes dont les inégalités criantes s’appuient sur des pratiques et des préjugés barbares hérités d’un passé ancien, et dont la survivance est alimentée par les classes possédantes. Dans un tel ordre social, la vie des pauvres, et en particulier des femmes pauvres, ne vaut pas cher. Après le colonialisme britannique, ce sont les grands partis indiens qui ont été les garants de cet ordre social depuis l’indépendance.

Les statistiques officielles font état de 25 000 viols par an en Inde. Mais selon les organisations féministes indiennes, 90 % des viols ne seraient pas comptabilisés, soit parce que les victimes n’osent pas porter plainte, soit parce que la police refuse d’enregistrer leurs plaintes pour ne pas déplaire aux coupables. Qui plus est, des milliers de jeunes mariées sont assassinées parce que leur famille ne remplit pas les conditions du contrat de mariage, reste de pratiques anciennes en principe interdites, réduisant les femmes au rôle de marchandise dans les relations interfamiliales.

Depuis 2012, suite à des affaires particulièrement choquantes de viols, des femmes et aussi des hommes se sont mobilisés, au moins dans les grandes villes, pour dénoncer cette situation. Depuis, des unités de police spécialisées, formées de policières, ont été créées et des mesures de sécurité pour les femmes ont été prises sur certaines lignes de bus. Seule cette mobilisation pourra faire évoluer la société et l’attitude des autorités.

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