Le front républicain face au FN : un piège pour les travailleurs25/03/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/03/2434.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Elections

Le front républicain face au FN : un piège pour les travailleurs

Dès les premiers résultats annonçant la défaite de la gauche au soir du premier tour des élections départementales, Manuel Valls a appelé « tous les républicains à faire barrage à l’extrême droite au second tour ». Il s’agit de la réédition du prétendu front républicain, que les dirigeants du PS proposent de constituer avec la droite, face au Front national.

Concrètement, cela devrait entraîner le retrait des candidats socialistes là où ils ne seraient arrivés qu’en troisième position derrière la droite et l’extrême droite. Et, bien sûr, cela impliquerait un appel à voter pour le candidat de droite. Valls, au lendemain du vote, a martelé : « Quand on a à choisir entre un candidat républicain et le Front national, on n’hésite pas. La gauche, elle, n’hésite pas. »

Cependant, les principaux dirigeants de la droite n’hésitent pas non plus : pas question de donner de consigne de vote en faveur de la gauche. Sarkozy a décidé de s’en tenir au « ni-ni » : ni appel à voter à gauche, ni pour le FN. Et donc, bien sûr, aucun retrait de candidats de droite susceptible de favoriser la victoire de la gauche.

Cette position gêne peut-être la fraction la plus modérée et centriste de la droite. C’est ce qui explique les contorsions d’un Juppé qui a déclaré accepter la ligne de l’UMP tout en soulignant que l’essentiel était de faire barrage à l’extrême droite… Derrière ces légères nuances, il ne faut pas chercher des désaccords idéologiques. Les uns et les autres se positionnent en fonction de leurs calculs électoraux, avec l’élection présidentielle de 2017 en ligne de mire.

La plupart d’entre eux ne veulent pas avoir l’air d’appuyer la gauche, car une grande partie des électeurs de droite se refusent à le faire, quand ils ne sont pas carrément attirés par les discours du Front national. Ces électeurs-là n’entendent pas se laisser bâillonner et sacrifier au nom de la défense de la République. Ce genre de renoncement est exigé seulement des travailleurs et des classes populaires par les dirigeants de la gauche.

Quand ceux-ci présentent la droite comme un rempart républicain au Front national, c’est une escroquerie politique. Appeler à voter pour elle n’a permis à aucun moment de faire obstacle au FN, et surtout pas à son programme. Quand, en 2002, la gauche a appelé à voter pour Chirac face à Le Pen, au deuxième tour de l’élection présidentielle, elle a permis l’élection de Chirac avec un score de plus de 80 %. Celui-ci a pu ainsi mettre en œuvre, avec Sarkozy au ministère de l’Intérieur, une politique inspirée des thèmes de campagne du FN vis-à-vis de l’immigration et de l’insécurité. C’est ainsi qu’en 2007 Sarkozy a pu être élu en siphonnant les voix de Le Pen qui a alors fait son plus mauvais résultat à ce type de scrutin depuis 1995. Mais depuis, déçu par Sarkozy, l’électorat d’extrême droite est retourné vers le Front national.

Cette politique du front républicain a montré sa faillite dans le passé et elle ne peut que conduire les travailleurs à une nouvelle impasse. En aucune façon elle ne peut permettre de faire reculer l’influence du FN dans les classes populaires. Au contraire, elle apporte de l’eau au moulin de Marine Le Pen quand elle se présente comme seule contre les représentants de « l’UMPS ». Les dirigeants du PS, en limitant le débat à ce terrain de la lutte contre le Front national, veulent faire oublier leurs responsabilités dans l’audience croissante du FN dans certaines couches populaires, du fait de la déception engendrée par la politique de Hollande, tout aussi antiouvrière que celle de Sarkozy avant lui. Quand Valls se présente comme le champion de valeurs communes avec l’UMP, il ne fait que démontrer qu’il n’a vraiment rien à proposer aux travailleurs.

Ce n’est pas l’union des prétendus républicains qu’il faut opposer au FN, mais l’union de tous les travailleurs face à tous leurs exploiteurs et face à tous ceux qui mènent une politique antiouvrière, de droite comme de gauche aujourd’hui.

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