Tchad : La France, soutien de la dictature03/12/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/12/2418.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Tchad : La France, soutien de la dictature

Lors du 15e sommet de la francophonie, à Dakar, au Sénégal, François Hollande a appelé, devant les chefs d'État africains, à faire preuve de « bonne gouvernance ». Faisant référence aux événements récents du Burkina Faso, il a expliqué qu'il ne fallait pas s'accrocher au pouvoir, et respecter les Constitutions.

Tout comme il y a deux ans, toujours à Dakar, lors de son premier voyage en Afrique, il a parlé de la fin de la Françafrique.

En dépit de ces beaux discours, l'impérialisme français multiplie les interventions pour défendre son pré carré et protéger les intérêts de ses grands groupes. Et s'il est une dictature africaine que la France continue à maintenir en place, c'est bien celle du Tchad.

Le dictateur tchadien Idriss Déby Itno, installé au pouvoir en 1990 par les services secrets français, n'a pas besoin de réviser la Constitution pour se maintenir au pouvoir : il l'a déjà fait depuis de nombreuses années, en abolissant toute limite en termes de nombre de mandats et d'âge. Sa prochaine candidature au pouvoir en 2016 est ainsi « légale ». Il a fait au passage disparaître l'un de ses opposants, Oumar Majamat Saleh, en 2008, qui dénonçait ce tripatouillage.

Tout ce que le Tchad compte de privilégiés qui gravitent autour du clan Déby se partage les dividendes de la rente pétrolière (le pays étant un producteur de pétrole depuis le début des années 2000). La population pauvre, elle, doit survivre avec moins de 1,5 euro par jour dans une misère intolérable. Le clan Deby a mis le pays en coupe réglée, pillant les richesses du pays, du pétrole au coton, en passant par la mainmise sur les transports et le commerce.

La corruption généralisée, la cherté des produits de première nécessité, la pénurie et la hausse du carburant, le non-paiement des salaires des professeurs, ont fait éclater le mécontentement. La pénurie d'essence - un comble dans un pays producteur de pétrole - et la hausse qui en découle sont organisées par les commerçants proches du pouvoir, qui détiennent le monopole de la distribution du carburant et en profitent pour s'enrichir.

Le 11 novembre, à l'appel des syndicats et d'associations pour protester contre la vie chère, élèves, étudiants et enseignants sont descendus dans la rue à Moundou et Sarh, deux villes du sud du pays, et à N'Djamena, la capitale. Ces manifestations ont été violemment réprimées. À Sahr, deux élèves ont été tués, deux autres écrasés par une citerne de l'armée. En tout, ces manifestations ont fait environ dix morts, sans compter les dizaines de blessés, interpellations et arrestations parmi les manifestants.

Que la dictature d'Idriss Déby Itno réprime dans le sang les manifestations, torture et assassine les opposants, déstabilise les pays voisins comme la Centrafrique, l'impérialisme français s'en accommode parfaitement, du moment que ses intérêts sont préservés. La dictature tchadienne est le pivot du dispositif militaire français au Sahel et en Afrique de l'Ouest.

Depuis 2013 et son intervention aux côtés des forces françaises de l'opération Serval, au Mali, Idriss Déby a été érigé par Paris en « rempart contre le terrorisme au Sahel ». François Hollande l'a reçu à l'Élysée et est aussi allé lui rendre visite en juillet. Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale, et Jean-Claude Le Drian, ministre de la Défense, ont été accueillis à bras ouverts par le régime. Enfin, Manuel Valls, Premier ministre, s'est également rendu au Tchad le 20 novembre, quelques jours après la répression des manifestations.

Est-ce là l'expression de la « non-ingérence » de la France dans les affaires africaines dont parlait François Hollande ?

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