Haïti : Manifestations populaires à Port-au-Prince03/12/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/12/2418.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Haïti : Manifestations populaires à Port-au-Prince

En Haïti, l'opposition a lancé depuis le mois de novembre une mobilisation dénommée « opération Burkina Faso », en vue d'exiger le départ du président Michel Martelly et l'organisation d'élections générales dans le pays. Les 25, 28 et 29 novembre à Port-au-Prince, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont envahi les rues à l'appel des partis et regroupements politiques de l'opposition, fortement influencée par le parti Lafanmi Lavalas de l'ex-président Jean-Bertrand Aristide, qui a fourni le plus gros contingent de manifestants.

La police s'est gardée d'intervenir de façon brutale, du moins le 25 novembre, où les journalistes étrangers étaient en grand nombre.

Martelly, qui d'habitude roule l'opposition dans la farine à travers des rencontres et consultations de toute sorte, a exprimé, cette fois, des signes d'inquiétude et a constitué une commission formée de personnalités politiques et religieuses pour faire des propositions de sortie de crise. Les principaux partis de l'opposition ont été invités, mardi 2 décembre, par l'ambassade américaine pour négocier. Peut-être en sortira-t-il un nouveau gouvernement, avec des postes ministériels pour les partis de l'opposition.

Nous publions ci-après un article de La Voix des Travailleurs, organe de l'Organisation des Travailleurs Révolutionnaires (OTR-UCI), paru le 20 novembre avant les dernières manifestations.

À l'appel des leaders de l'opposition, de Mopod, de Fanmi Lavalas, etc., ils étaient plusieurs milliers de manifestants dans les rues de Port-au-Prince, le 18 novembre, à l'occasion de la commémoration de la bataille de Vertières, pour réclamer la libération des prisonniers politiques, la démission du gouvernement Martelly-Lamothe et également le départ de Michel Martelly du pouvoir. Cela fait la énième manifestation des leaders de l'opposition, qui ne ratent jamais une date historique sans en profiter pour lancer une manifestation contre le pouvoir.

Le 17 octobre, la répression s'est limitée aux gaz lacrymogènes, bien qu'en quantité suffisante pour indisposer beaucoup de manifestants, dont le sénateur Moïse Jean Charles qui était à deux doigts de la mort faute de pouvoir respirer. Cependant, le 18 novembre a failli tourner au massacre quand des individus, à bord d'un pick-up « service de l'État », identifiés comme des policiers, ont tiré à bout portant sur la foule. Bilan : plusieurs blessés graves ; il y aurait eu des morts.

Des manifestants ou des badauds ont eu le temps de photographier la plaque d'immatriculation ainsi que des individus qui se trouvaient à bord du véhicule d'où partaient les tirs. L'opposition a révélé les noms de deux policiers au moins parmi les bandits qui ont sévi, au su et au vu des contingents de policiers qui escortaient la manifestation.

Si ces allégations se révèlent vraies, la répression sanglante de cette manifestation vient du pouvoir, d'autant que les policiers en uniforme qui étaient présents comme d'habitude n'ont pas réagi, ni pendant ni après la fusillade. La complicité ne pouvait être plus évidente.

De toute façon, le pouvoir n'est pas à son coup d'essai en fait de répression. Elles sont rares, les manifestations de l'opposition qui ont pu se dérouler jusqu'à la fin sans l'intervention des policiers pour les interrompre brutalement ou les empêcher de suivre l'itinéraire prévu.

La fusillade du 18 novembre, dans l'indifférence des patrouilles policières autour de la manifestation, laisse croire que le pouvoir est coupable et qu'il est en proie à la panique. Martelly et Lamothe sont sans doute passés à une vitesse supérieure dans la répression. Mais le chef de l'État et le Premier ministre courent le risque, au contraire, de provoquer la multiplication des manifestations et la croissance du nombre de manifestants, en solidarité avec les victimes, mais aussi pour exprimer leurs propres revendications.

En effet, les ingrédients sont réunis pour un cocktail explosif : la hausse du prix du carburant, la flambée des prix, l'augmentation du chômage et de la misère, les bas salaires dévorés par l'inflation, l'insécurité, etc. Mais ces problèmes ne sont pas vraiment ceux des leaders de l'opposition, qui ne jurent que par le départ de Martelly. Il revient aux travailleurs et à la population pauvre en général de mettre en avant leurs revendications et de se mobiliser à l'échelle du pays, sous leur propre bannière. C'est la seule voie pour imposer une amélioration des conditions de vie des classes pauvres.

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