Syrie : L'armée turque complice du massacre des Kurdes08/10/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/10/une2410.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Syrie : L'armée turque complice du massacre des Kurdes

Le 8 octobre, la ville kurde de Kobané dans le nord de la Syrie était à deux doigts de passer aux mains des troupes du groupe État islamique (EI), avec tout ce que cela signifie d'exactions. Et le moins qu'on puisse dire c'est que la coalition militaire internationale mise en place par les grandes puissances contre l'EI n'aura pas été d'un grand secours pour les combattants kurdes.

Car, derrière les formules sur la « lutte contre le terrorisme » servies aux opinions publiques d'ici, il y a les calculs cyniques des grandes puissances et de leurs alliés.

Les régions kurdes du nord de la Syrie ont obtenu leur indépendance de fait il y a à peine deux ans. C'était d'ailleurs un calcul du pouvoir syrien de concéder cette autonomie, d'une part pour concentrer ses troupes sur d'autres fronts et d'autre part pour enfoncer une épine dans le pied de la Turquie voisine qui, elle, soutenait les milices islamistes que le pouvoir syrien avait à combattre. Car le parti kurde qui prit la direction de ces régions du nord, le PYD (Parti de l'union démocratique), est allié du parti kurde de Turquie, le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), qui lui est en lutte depuis des décennies contre le pouvoir central d'Ankara. Le pouvoir local kurde s'est alors mis en place en s'appuyant sur des conseils de village et sur ses milices, les Unités de protection populaire, YPG, liées au parti PYD.

Mais, au fur et à mesure du développement de la guerre civile en Syrie, c'est juste au sud de ces régions autonomes kurdes que l'EI a installé ses bases les plus importantes. Et l'EI a alors rapidement cherché à écraser ce pouvoir kurde qui s'interposait entre lui et la frontière turque au nord. Avec des troupes bien plus lourdement armées que ce que pouvaient opposer les combattants kurdes, l'EI est arrivé à contrôler presque toute la ligne de frontière entre la Syrie et la Turquie, sauf l'enclave de Kobané jusqu'à ces derniers jours.

La Turquie, qui fait partie de la « coalition contre le terrorisme », a pris récemment la décision d'intervenir en Syrie contre l'EI, mais il paraît à peu près certain que son armée n'enclenchera les hostilités contre l'EI, si jamais elle les enclenche, qu'une fois les milices kurdes écrasées. Et si les États-Unis et leurs alliés ont, de leur côté, bombardé à plusieurs reprises les troupes de l'EI, c'est en sachant pertinemment que cela n'aurait quasiment aucun effet. Pour ménager leur allié d'Ankara, ils se sont bien gardés de fournir l'armement qui aurait été nécessaire aux milices kurdes pour résister à l'avancée de l'EI.

En même temps, le gouvernement turc d'Erdogan a d'ailleurs envoyé ses forces de répression contre les manifestants kurdes de Turquie qui protestaient contre sa complicité de fait avec l'EI. La répression a fait plusieurs morts.

La tragédie de Kobané s'ajoute aux massacres et actes de barbarie dont ont été victimes les populations de la région. Et elle donne un aperçu des manoeuvres des grandes puissances et de leurs alliés qui, pour mener leur politique, s'appuient sur les forces les plus réactionnaires, même quand elles prétendent les combattre.

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