Italie : Le patronat ordonne, le gouvernement obéit08/10/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/10/une2410.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : Le patronat ordonne, le gouvernement obéit

Matteo Renzi, le fringant chef du gouvernement italien, qui conduit le Conseil des ministres en jeans - haute couture tout de même - , s'est hissé à ce poste sur la promesse d'envoyer tout le vieux système politique « à la casse ». En défendant son projet de réforme du marché du travail, il s'attaque maintenant à ce qu'il présente comme une autre vieillerie, le Statut des travailleurs, et en particulier son article 18, qui prévoyait la possibilité, pour un travailleur licencié de façon abusive, d'être réintégré dans l'entreprise.

Déjà vidé d'une grande partie de son contenu par les mesures des gouvernements précédents, cet article 18 ne s'applique plus désormais qu'à une minorité de travailleurs.

Mais, derrière le symbole de l'article 18, ce qui est visé, c'est tout ce qui pourrait gêner le patronat italien et l'empêcher de licencier à sa guise et selon ses conditions. « Il faut donner la possibilité de licencier facilement, pour que les patrons puissent embaucher », explique ainsi Renzi, montrant qu'il n'hésite pas à reprendre de vieux arguments quand ils viennent du patronat... Renzi veut également que ce patronat puisse embaucher des travailleurs pour quelques jours, voire quelques heures : c'est ainsi que la réforme prévoit l'utilisation des Voucher lavoro (l'équivalent des chèques emploi service) pour « toutes les catégories productives », et plus seulement pour les heures de ménage ou de baby-sitting chez des particuliers.

En supprimant les quelques garanties qui pouvaient encore protéger les salariés, notamment dans les grandes entreprises, Renzi explique sans rire qu'il favorise l'égalité entre tous les salariés et que la facilité plus grande de licencier pour les entreprises sera compensée par l'État. Il promet la généralisation d'une allocation chômage qui pourrait être de 800 euros, mais pour laquelle il n'y a pas pour l'instant le moindre début de financement. Le patronat applaudit des deux mains, et Renzi a reçu les félicitations chaleureuses de Marchionne, le PDG de Fiat-Chrysler, le premier à avoir imposé des contrats au rabais aux travailleurs dans ses usines.

Dans les rangs du Parti démocrate, le parti de Renzi, issu de l'ex-Parti communiste italien, devenu il y a vingt-cinq ans Parti démocratique de la gauche pour finalement abandonner même cette vague référence, une minorité de responsables a fait mine de protester contre cette « dérive ». Après quelques déclarations indignées dans les journaux, ces « frondeurs » sont vite rentrés dans le rang. Lors du vote au sein du parti, le 30 septembre, seuls vingt des 130 opposants déclarés ont voté contre la réforme.

Les directions syndicales ont toutes protesté aux premières annonces, mais deux se sont contentées de la promesse de discussions et d'aménagements. Seule la CGIL maintient une journée de manifestation nationale pour le 25 octobre prochain et parle d'une possible journée de grève générale pour plus tard.

En 2003, les attaques contre le Statut des travailleurs et son article 18 avaient suscité d'importantes manifestations et permis de faire reculer le gouvernement de droite de l'époque. Dix ans plus tard, c'est à nouveau sur leurs seules mobilisations que les travailleurs doivent compter pour s'opposer aux coups que Renzi leur assène au nom de la « modernité ».

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