Les pommes, leurs pépins, et les subventions... pour détruire fruits et légumes27/08/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/08/une2404.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les pommes, leurs pépins, et les subventions... pour détruire fruits et légumes

En réponse à l'embargo décrété par Moscou sur les produits alimentaires européens et américains, qui vise 10 % des exportations agricoles de l'Union européenne, Bruxelles a débloqué 125 millions d'euros. Soutenue par les gouvernements européens, et français tout particulièrement, la Commission européenne dit vouloir aider les producteurs de pommes, pêches, raisins, kiwis, fruits rouges, carottes, tomates, concombres, etc., confrontés à une perte de débouchés, et éviter que « les prix ne chutent à un niveau de crise ».

Derrière ces déclarations hypocrites se dissimule mal une réalité écoeurante : celle de la subvention de certains secteurs de la bourgeoisie au travers de subventions à la réduction de la production alimentaire. Les mesures adoptées prévoient que 10 % environ de ces fruits et légumes seront détruits ou détournés vers l'alimentation animale. Comment en arrive-t-on à pareille aberration ?

Certains fruits et légumes ne pouvant désormais plus se vendre en Russie, ils devraient se retrouver en plus grand nombre sur les étals européens. L'offre augmentant, leurs prix devraient baisser : les tenants du capitalisme nous ont assez dit que c'était là un des bienfaits de leur économie de marché.

Mais cela ne fait pas l'affaire des représentants des lobbys de la grande distribution, de l'agriculture et de l'agro-alimentaire. Et nos dirigeants, qui n'ont rien à leur refuser, au lieu de laisser jouer le marché, ont donc décidé de débloquer des fonds... pour jeter ou réduire des productions qu'ils qualifient d'excédentaires.

Excédentaires, elles le sont par rapport au bénéfice qu'en attendent les capitalistes qui gravitent autour d'elles. Mais elles ne le sont pas pour les consommateurs, et d'abord ceux des classes populaires qui, vu les prix pratiqués, doivent restreindre leurs achats de fruits et légumes.

Quant aux horticulteurs et aux maraîchers, objets affichés des attentions des politiques dans l'affaire, tous ne sont pas logés à la même enseigne. Un représentant de la Confédération paysanne a déclaré qu'en fait « seuls ceux qui passent par de grosses structures de distribution risquent » de voir la couleur des subventions annoncées. Et il y a quelques jours, en France et en Espagne, de petits producteurs de pêches disaient que le prix de rachat d'une partie de leur production ne couvrait pas leurs frais. Mais l'opération permettait de maintenir les prix à un niveau élevé... dans le commerce.

La Commission européenne a annoncé qu'elle pourra prendre des mesures de plus grande ampleur encore pour « soutenir d'autres secteurs » (viande, produits laitiers) concernés par l'embargo, en rachetant à prix subventionné une partie de leur production.

C'est fou ! C'est révélateur aussi de ce qu'est la société capitaliste, qui considère l'abondance comme une catastrophe : un système aberrant, inefficace, socialement injuste. C'est un système incapable de garantir aux petits producteurs des conditions qui leur permettent de vivre de leur travail, et incapable d'assurer à tous les consommateurs de quoi satisfaire leurs besoins élémentaires.

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