Espagne : La manifestation du 22 mars, un succès encourageant pour le monde du travail26/03/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/03/une2382.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Espagne : La manifestation du 22 mars, un succès encourageant pour le monde du travail

La manifestation qui s'est déroulée à Madrid le samedi 22 mars a rassemblé des centaines de milliers de personnes venues de toutes les régions du pays. Certaines étaient venues de loin à pied, allant de ville en ville depuis parfois plusieurs semaines. D'autres avaient voyagé en bus ou en train pour se constituer en « colonnes » nombreuses auxquelles se sont joints des milliers de manifestants venus des banlieues ouvrières de Madrid. Il y avait aussi les cortèges des « marées », regroupant les salariés autour de banderoles aux couleurs différentes selon le secteur d'activité, comme la santé ou l'enseignement, où le personnel a mené au cours des derniers mois des luttes importantes et a fait reculer les autorités. Les pompiers de Madrid et d'autres régions, remarqués pour leurs uniformes, s'étaient organisés pour assurer le service d'ordre de la manifestation dont ils étaient aussi partie prenante.

Les manifestants, rassemblés dans un premier temps autour des deux principales gares de Madrid, ont convergé vers la très vaste place de Colon, au centre de la capitale. C'est là que des représentants d'organisations et de regroupements de toutes les régions se sont adressés à la foule. Ils se sont succédé à la tribune pour expliquer que cette « marche de la dignité » ne devait être qu'une étape vers une lutte d'ampleur pour imposer des revendications qui permettent aux classes populaires de vivre « dignement », avec un emploi, un toit et la garantie des droits sociaux remis en cause depuis plusieurs années par les coupes budgétaires incessantes.

Ces intervenants, appartenant à des organisations syndicales, associatives ou politiques différentes, exprimaient avec passion la colère des classes populaires. Ils insistaient sur la fierté d'être des ouvriers, des travailleurs, et affirmaient la convergence nécessaire des combats à mener solidairement. Il y eut des moments d'émotion quand, en des termes simples et poignants, un jeune chômeur de Murcie ou une représentante des Asturies dirent leur colère et leur espoir dans les luttes pour changer le cours des choses.

Le meeting fut clos par l'intervention de Diego Cañamero, le leader du SAT (Syndicat andalou des travailleurs), à l'initiative de cette mobilisation. Ce mouvement syndical et politique implanté en Andalousie avait structuré cette marche au fil des six derniers mois écoulés et les syndicats minoritaires CGT et CNT, ainsi que de nombreuses organisations et partis politiques, s'y étaient ralliés. Devant le succès de cette marche entraînant de nombreux participants, le syndicat Commissions ouvrières, l'un des syndicats majoritaires, a fini par s'en déclarer solidaire.

Diego Cañamero a conclu son discours en appelant au développement des luttes, et lancé l'idée d'une grève générale dans l'ensemble du pays, en espérant que les travailleurs syndiqués dans les syndicats majoritaires profiteraient de cet appel pour entrer dans l'action.

Le problème clef reste la mobilisation des salariés des grandes entreprises privées et publiques, dans lesquelles sont implantés les syndicats majoritaires. Depuis des années, ils négocient avec le gouvernement plutôt que de chercher à organiser les luttes des travailleurs pour faire reculer le patronat, qui multiplie les licenciements, les baisses de salaire et mettre un coup d'arrêt aux diverses attaques contre les salariés. Ce qui sera décisif sera la capacité de cette fraction de la classe ouvrière à se servir de sa force.

Ce mouvement s'inscrit d'une certaine façon dans la suite du mouvement de contestation des Indignés, le 15M, né le 15 mai 2011, mais il se réfère davantage aux intérêts ouvriers. À la différence du 15M, il ne fait pas obstacle à l'expression des idées politiques, à l'apparition des partis ou organisations en tant que telles. Ses objectifs restent imprécis, se limitant à parler de la démission du gouvernement, du non-paiement de la dette ou de rejet de la Troïka. Mais il a le mérite d'ouvrir des perspectives de contestation sociale en s'appuyant sur le succès d'une mobilisation réussie.

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