Il y a 70 ans, le 2 février 1943 : La victoire de l'URSS à Stalingrad Un tournant dans la Seconde Guerre mondiale20/02/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/02/une2325.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

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Il y a 70 ans, le 2 février 1943 : La victoire de l'URSS à Stalingrad Un tournant dans la Seconde Guerre mondiale

Il y a 70 ans, la reddition du général allemand von Paulus le 2 février 1943 à Stalingrad fut considérée à juste titre comme le tournant de la Seconde Guerre mondiale. Hitler avait cru pouvoir soumettre l'URSS militairement, mais c'était sans compter sur les immenses atouts que conféraient à cette dernière l'étendue du territoire, ainsi qu'un système économique et une organisation sociale hérités de la révolution d'Octobre 1917, qui lui permirent de constituer en peu de temps une force militaire supérieure à celle de son adversaire. Mais la défaite allemande, à Stalingrad et ensuite dans toute l'Union soviétique, fut avant tout due à la mobilisation de tout un peuple, en dépit de la politique suicidaire et criminelle de la clique stalinienne au pouvoir.

Les premiers mois de la guerre en URSS avaient pourtant semblé conforter le régime nazi. Durant l'été 1941, les armées allemandes avaient atteint Leningrad et Moscou en quelques semaines. À l'automne, elles occupaient un territoire où vivait 40 % de la population et qui produisait 60 % des matières agricoles, minières et industrielles du pays. En juin 1942, elles atteignaient Stalingrad.

Le répit gagné par le régime stalinien avec la signature du pacte germano-soviétique de septembre 1939 n'avait même pas été mis à profit par Staline et sa clique au pouvoir. Il avait pourtant été parfaitement averti des intentions d'Hitler à l'égard de l'URSS : piller ses richesses et asservir ses habitants, considérés par les nazis comme des sous-hommes. Par ailleurs, le nazisme se déclarait l'ennemi mortel de l'espoir que la révolution d'Octobre avait soulevé dans le prolétariat mondial et dont l'Union soviétique, malgré le régime stalinien, était encore porteuse.

L'URSS mobilise ses forces

Après les désastres militaires des premiers mois, dans lesquels la direction stalinienne portait une énorme responsabilité, les dirigeants soviétiques avaient dû se ressaisir. Ils commencèrent par remplacer les gradés jugés responsables de la défaite, une purge qui, tout en étant moins brutale, était dans la lignée de celle effectuée en 1937-1938, qui avait décapité l'état-major, Staline faisant exécuter ou déporter 90 % des cadres militaires formés pendant la révolution d'Octobre et la guerre civile. Les gradés démis de leurs fonctions furent remplacés par de jeunes officiers qui avaient prouvé leurs capacités au cours des combats contre l'armée allemande.

Le pouvoir procéda aussi à des déplacements massifs de population vers l'est du pays, afin de procéder à la reconstruction des industries de guerre. Un des éléments de la renaissance de l'appareil productif fut dans le mode de production soviétique, la planification et la nationalisation de l'économie. Un autre fut l'énergie déployée sans compter par les ouvriers, qui acceptèrent les sacrifices et les conditions de vie et de travail très dures, avec pour résultat qu'ils dépassèrent même les normes de production imposées. Ils savaient que les nazis ne leur laissaient d'autre choix que mourir ou être réduits en esclavage, les massacres des populations et les déportations vers les camps de travail allemands dans les régions occupées étant dans toutes les consciences.

Staline sut s'appuyer sur cette réaction de la population, mais ce fut en s'éloignant encore plus des idées communistes et internationalistes. Il développa une propagande nationaliste d'union sacrée : l'ennemi n'était pas l'impérialisme allemand mais « l'Allemand », ce qui incluait le prolétariat de ce pays, jugé par le régime stalinien responsable de la victoire des nazis du fait de sa passivité ! Il chanta les louanges du patriotisme russe, fit appel à la religion et à la hiérarchie religieuse pour soutenir le régime, il rétablit dans l'armée les titres et décorations abolis en 1917 et, tournant encore plus le dos à l'internationalisme, multiplia les gestes envers les puissances impérialistes occidentales qui devinrent « les grands alliés ».

Pourtant, plus que la propagande patriotique ou les bibelots militaires, ce fut le profond attachement aux acquis de la révolution d'Octobre qui mobilisa les travailleurs soviétiques, qu'ils soient dans les usines, les kolkhozes ou sous l'uniforme. Alors qu'au début de la guerre l'appareil du parti s'était révélé défaillant, laissant les populations livrées à elles-mêmes, la résistance partit des usines, dont les ouvriers (et parmi eux de nombreuses femmes) prirent en main la défense ainsi que celle de leurs villes. Et cette avant-garde ouvrière entraîna derrière elle l'ensemble de la population, qui combattit pied à pied pour défendre chaque mètre carré de terrain.

La bataille de Stalingrad

La résistance de Stalingrad ne fut pas un cas isolé, puisque Leningrad et Moscou avaient aussi tenu face aux armées hitlériennes. Mais par son ampleur, et en forçant pour la première fois une armée à la reddition, elle illustra l'héroïsme déployé par la population dans la lutte contre la régression sociale et la servitude qu'aurait entraînées une victoire des nazis.

Hitler croyait en une guerre éclair à Stalingrad, où une victoire lui aurait ouvert les portes des réserves pétrolières du Caucase. Les débuts de la campagne furent effectivement à l'avantage des armées hitlériennes. Le 23 août, elles bombardèrent la ville, faisant 40 000 victimes et, un mois plus tard une attaque en force leur permit de tenir le centre. Stalingrad semblait alors quasiment perdue, malgré l'héroïsme des travailleurs et des soldats qui se battaient dans le chaos, la terreur, n'ayant que des ruines pour abri, allant jusqu'au combat au corps à corps, afin de défendre « chaque brique, chaque pierre, chaque mètre du sol de Stalingrad ». Et ils tinrent bon, ayant choisi d'y laisser la vie plutôt que de reculer, réussissant ainsi à bloquer l'avancée allemande.

Le 19 novembre, l'Armée rouge reprit l'offensive. Ce n'était plus celle de juin 1941, elle avait acquis une force en armements bien supérieure à celle de son adversaire, reposant sur une production tout entière tournée vers l'industrie de guerre, en plus d'une force humaine composée de soldats et d'officiers luttant pour leur vie.

Parmi les troupes allemandes, en revanche, le moral était tombé au plus bas. À 3 000 kilomètres de leur base, l'approvisionnement en équipement et en nourriture se faisait mal. Voulant faire croire à une campagne courte, Hitler avait refusé que soient livrés les uniformes d'hiver, et les soldats étaient d'autant moins capables d'affronter les températures glaciales, entre - 30° et - 40 °, qu'ils étaient mal nourris : Theodor Pliever relate dans son roman Stalingrad que la ration quotidienne se composait de 50 g de pain, de 8 g de pois cassés, 25 g de viande et 5 g de bouillon... quand elle était fournie ! Les hommes mouraient par milliers, non seulement sous les attaques russes, mais aussi de la faim, du froid, du typhus.

En quatre jours d'offensive, du 19 au 23 novembre 1942, l'Armée rouge encercla Stalingrad. Progressant jour après jour, elle obligea la VIe armée de von Paulus, complètement encerclée dans le « chaudron », à capituler le 2 février 1943. La victoire de Stalingrad, préfigurant celle de 1945, fut ainsi acquise grâce à l'héroïsme des travailleurs de l'Union soviétique qui, malgré la dictature stalinienne, se battirent pour défendre une organisation sociale dont les bases avaient été érigées lors de la révolution d'Octobre 17.

Malheureusement, après la guerre, Staline se servit du double prestige de la révolution et des immenses sacrifices consentis par la population pour triompher de la barbarie nazie, pour étouffer toute tentative révolutionnaire parmi les peuples victimes de la guerre, que ce soit dans les pays occidentaux comme l'Italie ou la France, ou en URSS même. Car cela aurait signifié la chute de la clique de Staline et le retour aux idéaux de la révolution d'Octobre.

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