Canada : Face à la pression des compagnies, une mobilisation des Amérindiens09/01/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/01/une2319.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Canada : Face à la pression des compagnies, une mobilisation des Amérindiens

Depuis quelques semaines, un mouvement de protestation des populations autochtones se développe au Canada. Des manifestations, barrages de routes ou de voies ferrées ont eu lieu dans plusieurs provinces et, depuis début décembre, Theresa Spence, la chef de la première nation d'Attawapiskat, un peuple autochtone cri du nord de l'Ontario, a entamé une grève de la faim sur une île d'Ottawa. Elle exige d'être reçue par le Premier ministre conservateur, Stephen Harper.

Les habitants autochtones sont, au dernier recensement, sur 33 millions de Canadiens, environ 1,7 million. Descendants des premiers peuples d'Amérique, ils sont regroupés en quelque six cents communautés désignées sous les termes de bandes, premières nations ou collectivités. Les attaques contre leur habitat, leur terre, leur mode de vie sont d'autant plus choquantes que les communautés amérindiennes du Canada ont dû combattre quelque 150 ans pour voir leurs droits plus ou moins pris en compte. Pour ceux qui vivent dans les réserves, les conditions sont très variables selon les activités économiques possibles, et selon les provinces ou territoires.

Ce qui motive leur colère, exprimée par le mouvement Idle No More -- Finie, la passivité --, est une série de modifications législatives portant sur la Loi sur les Indiens et la Loi sur la protection des eaux navigables qui régissent l'administration des terres leur appartenant. Dans le premier cas, le mode de consultation des communautés en cas de vente ou de location des terres des réserves est modifié, ce qui peut conduire à l'expropriation de bandes au profit d'entreprises intéressées à l'exploitation du sol ou du riche sous-sol. Dans le deuxième cas, la protection ne s'appliquerait plus, selon les opposants, qu'à 97 lacs et 62 rivières, sur des dizaines de milliers existant dans le pays, dont beaucoup dans les territoires habités par les peuples autochtones. À l'occasion de ces modifications législatives, le gouvernement fédéral n'a pas jugé bon d'obtenir l'accord des représentants des peuples autochtones, ni même de les consulter pour des lois touchant pourtant leurs territoires.

Les discriminations et injustices sont de longue date ressenties par les Amérindiens, notamment du fait de manquements des autorités quant au respect des traités régissant leur statut et leurs conditions de vie. Certaines « bandes » souffrent d'une « pénurie de ressources et d'une inégalité de financement pour des services tels que l'éducation et le logement », comme le dénonce le manifeste du mouvement Idle No More.

Des porte-parole témoignent également des conditions de vie matérielle misérables de certaines communautés, des logements précaires, parfois de l'absence de raccordement électrique ou d'eau courante, de la pauvreté, du fort taux de suicides. L'an dernier, à la même époque, la réserve crie d'Attawapiskat, que Theresa Spence représente, avait décrété l'état d'urgence tant les conditions de l'habitat étaient insupportables, des familles gelant dans des logements insalubres. La pénurie de logements abordables est générale et, en cinq ans, le nombre construit a baissé de 90 %. Pendant ce temps, « les ressources des territoires continuent d'être profitables pour les gouvernements fédéral et provinciaux, qui taxent les compagnies les exploitant et versent ensuite de faibles compensations aux premières nations pour l'utilisation de (leurs) territoires traditionnels », dénonce Theresa Spence dans sa lettre au Premier ministre.

Aux injustices habituelles subies par les Amérindiens s'ajoute une pression de plus en plus forte des compagnies minières et des divers capitalistes pour exploiter leurs terres au moindre coût sans l'avis des occupants et souvent contre leur intérêt. Ceux-ci sont décidés à ne pas l'accepter.

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