Entre rentabilité capitaliste et santé publique Le gouvernement a choisi la rentabilité25/10/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/10/une2308.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Entre rentabilité capitaliste et santé publique Le gouvernement a choisi la rentabilité

« Cela devait arriver » : voilà ce que disent les habitants de Lacapelle-Marival dans le Lot quand ils apprennent qu'une de leurs voisines a perdu son bébé entre son domicile et la maternité, située à plus d'une heure de route. Voilà ce que disent les pompiers, qui ont dû procéder à plusieurs accouchements depuis que la maternité la plus proche a fermé.

Ceux qui s'opposent aux fermetures de maternités et d'hôpitaux dans les zones rurales en témoignent : les pouvoirs publics qui prennent les décisions de fermeture sont prévenus des dangers. Mais, entre les risques pour la santé publique et les économies que cela représente, ils choisissent les économies. Ce sont des choix criminels.

En 1975, il y avait 1 370 maternités, aujourd'hui il n'y en a plus que 535. Les plus hypocrites justifient les fermetures par le fait que les maternités à moins de 300 accouchements par an ne seraient pas assez sûres. Mais accoucher dans une voiture, sur une aire d'autoroute, n'est certainement pas mieux ! Quant aux autres, ils le disent ouvertement : il s'agit de rationaliser et de rentabiliser le fonctionnement des hôpitaux.

Hollande et Marisol Touraine, la ministre de la Santé, ont déploré « une situation dramatique ». Mais, comme la droite, la gauche a une responsabilité écrasante dans cette situation. De 1997 à 2002, le gouvernement Jospin en a fermé, lui aussi, des maternités et des hôpitaux de proximité. Les franchises médicales, le forfait hospitalier, les déremboursements, les restrictions drastiques sur la santé, c'est autant de la responsabilité de la gauche que de la droite.

Et combien d'autres drames passés sous silence ? Faute de places dans les hôpitaux, les malades se font faire les poches par les cliniques privées et les médecins en secteur libre qui pratiquent les dépassements d'honoraires.

Combien de personnes renoncent à des soins ou à des médicaments parce qu'elles ne peuvent plus se payer de mutuelle ? Combien ne peuvent consulter un spécialiste, ne serait-ce qu'un dentiste, parce qu'elles n'ont pas l'argent ou parce qu'il n'y en a pas, comme dans les zones rurales et dans certaines banlieues populaires transformées aussi en déserts médicaux ?

Les caisses de l'assurance-maladie, de la vieillesse et des allocations familiales, comme celle du chômage, sont alimentées principalement par les cotisations sociales. Payées pour partie par les patrons et pour partie par les salariés, ces cotisations représentent du salaire différé qui doit revenir aux travailleurs.

Diminuer les cotisations patronales, comme le demande le patronat et comme l'envisage le gouvernement, serait un cadeau aux patrons mais une perte sèche pour les travailleurs. Car si les cotisations versées par le patronat ne rentrent plus, qui paiera alors pour les hôpitaux, pour les médicaments, pour les aides au logement, pour les crèches, pour les retraites ?

Il y a déjà, annuellement, plus de 30 milliards d'exonérations de cotisations. Alors, alléger encore de plusieurs milliards la facture des patrons et les transférer sur d'autres impôts serait un vol de plus sur les salaires et une agression contre la protection sociale. Alors, si les patrons veulent être plus compétitifs dans la guerre commerciale qu'ils se mènent, qu'ils rognent sur leurs marges bénéficiaires ! Mais la santé, la retraite et les besoins vitaux des classes populaires n'ont pas à être sacrifiés sur l'autel de leur compétitivité.

Marisol Touraine prétend faire de la défense de l'hôpital public son cheval de bataille. Mais a-t-elle prévu des embauches de personnel hospitalier ? Non. Elle s'est engagée à ce « qu'aucun Français ne soit à plus 30 minutes de soins d'urgence », mais a-t-elle programmé le financement de centres de santé de proximité ? Non. Le gouvernement a, au contraire, prévu de faire 657 millions d'économies sur les hôpitaux. Et si la ministre ne parle pas de « rentabilité », elle dit vouloir « renforcer l'efficience interne des établissements ». Où est la différence ?

Tout doit-il être rentable dans cette société ? L'éducation, la santé doivent-elles être rentables ? Est-ce que s'occuper des anciens atteints d'Alzheimer cela doit être rentable ? Est-ce que soigner les malades d'un cancer, cela doit être rentable ? Bien sûr que non !

Le bon fonctionnement des services publics a été pendant longtemps un des indices les plus sûrs du degré de développement d'un pays, et même du degré de civilisation. Ne laissons pas les capitalistes et leurs serviteurs au pouvoir la faire reculer.

Éditorial des bulletins d'entreprise du 22 octobre

Partager