La paix capitaliste c'est la guerre sociale ou la guerre tout court17/10/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/10/une2307.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

La paix capitaliste c'est la guerre sociale ou la guerre tout court

Non, on ne rêve pas quand Hollande fait de la France le défenseur en titre des droits de l'homme en Afrique. Non, l'attribution du prix Nobel de la paix à l'Union européenne n'est pas un gag.

Faut-il se glorifier que depuis soixante ans les principales puissances européennes ne se sont pas entre-tuées, comme elles l'ont fait à deux reprises lors de la Première et de la Seconde guerres mondiales ? Quant à prétendre que l'Union européenne a assuré la paix sur le continent depuis soixante ans, c'est avoir la mémoire courte. Oubliée, la guerre qui a ensanglanté les Balkans il y a quinze ans ! Oublié, le massacre de Srebrenica !

Et oubliées, surtout, les guerres infectes menées par ces mêmes puissances en dehors de l'Europe, pour préserver leur domination en Algérie, au Vietnam, au Moyen-Orient. Oh, la guerre n'est pas sur le sol de l'Union européenne, mais des soldats français, britanniques, espagnols bombardent et tuent en Afghanistan. Si des troupes françaises sont basées en Afrique, ce n'est pas pour promouvoir les droits de l'homme, mais pour voler au secours de dictateurs mal en point.

Présenter la France ou l'Union européenne comme facteurs de paix, de coopération et de solidarité est une sinistre comédie.

D'autant plus sinistre, en ce qui concerne l'Union européenne, qu'elle menace d'éclater. La crise et les attaques spéculatives contre la zone euro opposent les pays européens les uns aux autres, creusent les inégalités, confortent la tutelle des deux impérialismes dominants, la France et surtout l'Allemagne, sur les autres. Les réflexes égoïstes, protectionnistes et nationalistes sont autant de menaces d'affrontements pour l'avenir.

Ce prix Nobel de la paix est d'autant plus déconnecté de la réalité qu'en Europe des millions de travailleurs perdent leur travail, leurs économies, leurs biens et voient leur existence mise en danger. Des millions de travailleurs en sont à se demander comment vivre avec un salaire en moins dans la famille. Comment surnager avec un revenu amputé d'un tiers, voire de la moitié comme en Grèce ? Comment survivre avec une pension de retraite inférieure au loyer ? Où trouver de quoi manger ? Comment se loger, se chauffer ?

La crise a aggravé la guerre sociale en aggravant l'exploitation et la rapacité patronale, et aucune région au monde n'y échappe.

En Afrique, où un salaire de 100 ou 200 euros paraît un privilège à l'écrasante majorité qui est au chômage, cette guerre sociale est d'une tout autre ampleur. La colonisation d'abord puis l'impérialisme ont condamné les pays d'Afrique au sous-développement, les transformant en réservoirs de matières premières et de bras à exploiter.

Aujourd'hui, le pillage des ressources minières de l'Afrique par les multinationales françaises se poursuit : Areva pour l'uranium, Total pour le pétrole, Rougier pour les essences de bois. Bolloré et Bouygues contrôlent le commerce, les ports, les chemins de fer en Côte-d'Ivoire et au Sénégal. Tant que ces multinationales seront présentes, la Françafrique a de beaux jours devant elle.

Ce n'est pas par amour de la langue française que Hollande a participé au sommet de la francophonie à Kinshasa en République démocratique du Congo (RDC), mais pour y défendre les intérêts des capitalistes français. Hollande peut faire son cinéma sur la démocratie et les droits de l'homme, il peut se pincer le nez en serrant la main à Kabila, dictateur de cette république, ou à Bongo, le maître du Gabon : il compte sur eux pour assurer l'ordre et les affaires françaises.

En dépit des grands discours sur la non-ingérence, la France intervient en permanence pour défendre son pré carré africain. Elle est intervenue militairement en avril 2011 pour aider Ouattara à accéder au pouvoir en Côte d'Ivoire et elle veut aujourd'hui intervenir au Mali. Ces interventions se font toujours au nom de la démocratie, de la liberté contre le terrorisme, mais elles sont en réalité le moyen pour l'État français de protéger la chasse gardée des grands groupes français.

Tant que le pouvoir économique appartient au grand capital et le pouvoir politique à ses hommes de main, les classes exploitées et les peuples opprimés n'auront droit qu'à des discours doucereux des chefs d'État et des prix Nobel d'hypocrisie, et à l'exploitation, aux coups et à la misère, toujours.

Éditorial des bulletins d'entreprises du 15 octobre

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