Chine-Japon : Un conflit qui en rappelle d'autres20/09/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/09/une2303.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Chine-Japon : Un conflit qui en rappelle d'autres

Relatant les manifestations antijaponaises qui se déroulent dans plusieurs grandes villes de Chine, la presse rappelle qu'elles tombent un jour anniversaire et ne doivent donc rien au hasard. En effet, le 18 septembre 1931, prétextant d'un attentat qu'elle avait elle-même organisé, l'armée japonaise envahissait la Mandchourie chinoise.

Ce n'était pas seulement le début de quatorze années de guerre et d'une occupation ponctuée de nombreuses atrocités, c'était le point culminant du dépeçage de la Chine par les puissances impérialistes. Cette époque reste pour les Chinois celle de « l'humiliation nationale » d'un peuple qui fut plus d'un siècle durant la proie des pillards occidentaux et japonais.

Les manifestants d'aujourd'hui, tolérés si ce n'est encouragés par le gouvernement chinois, protestent contre la vente à l'État japonais de quatre îlots inhabités, propriétés jusque-là d'un milliardaire japonais. Ces îlots, Diaoyu en chinois, Senkaku en japonais, sont revendiqués par les deux pays pour des raisons stratégiques, le moindre bout de terre constituant un appui important en cas de guerre, et économiques, car leurs eaux sont poissonneuses et recouvrent peut-être des gisements d'hydrocarbures. L'affrontement, pour l'instant verbal, s'appuie sur les passions nationalistes, chacun affirmant que ces îlots désolés appartiennent de toute éternité à la mère patrie.

La question semble aujourd'hui cristalliser la concurrence économique et diplomatique entre la Chine et le Japon, deux voisins qui s'opposent pour peser dans cette région du monde. Mais, jusqu'à aujourd'hui et quels que soient les commentaires, il ne s'agit pas d'une concurrence entre égaux : c'est le capital japonais qui, comme celui des autres puissances impérialistes, s'investit en Chine, y exploite des prolétaires et rapatrie les bénéfices, et non l'inverse.

Le gouvernement chinois, traversant une période économique et politique délicate, s'offre à bon compte l'image d'un défenseur du peuple contre la pression des impérialistes en général et des Japonais en particulier. Ses roulements de tambour à propos des îles de la mer de Chine lui permettent de faire un peu oublier que c'est lui qui met le travail de centaines de millions de prolétaires chinois surexploités à la disposition du grand capital international, et que ses membres, leurs familles et leurs alliés ont fait leur fortune en transformant le pays en réserve mondiale de main-d'oeuvre à bon marché.

Les îles Diaoyu-Senkaku ne sont ni le seul archipel ni la seule portion de l'océan que les pays riverains se disputent dans cette région. Mais cette fois-ci, la tension est brusquement montée : la Chine a envoyé des bâtiments de guerre et menace le Japon de rétorsions économiques, les manifestants chinois s'en sont pris à des entreprises japonaises, les nationalistes japonais se sont manifestés à leur tour et la diplomatie japonaise a opportunément rappelé l'alliance historique Japon-États-Unis. Les appels au calme du gouvernement américain ne masquent pas son appui au Japon et sa volonté de limiter les ambitions chinoises. Les commentateurs occidentaux emboîtent naturellement le pas des diplomates, fustigeant le nationalisme chinois et défendant le statu quo d'un monde dominé par l'impérialisme, y compris japonais.

Pour le moment chacun se limite à bomber le torse et à dénoncer l'adversaire. Mais le passé démontre que l'on passe parfois plus vite qu'on ne le pense de la guerre des mots à la guerre ouverte.

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