PSA : Quand Montebourg appelle les travailleurs à se laisser faire30/08/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/08/une2300.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

PSA : Quand Montebourg appelle les travailleurs à se laisser faire

Lors d'une interview télévisée, le ministre Arnaud Montebourg a dit clairement aux travailleurs de PSA menacés de licenciement que ce n'était pas la peine d'attendre de lui un soutien dans leur lutte.

En juillet, devant l'émotion suscitée dans l'opinion par l'annonce officielle de la fermeture de l'usine PSA d'Aulnay et la suppression de 8 000 emplois par le groupe, le ministre dit du « Redressement productif » avait dû se fendre de quelques déclarations scandalisées. Oh, rien de bien radical ! Le ministre s'était contenté de dire qu'il n'accepterait pas le plan de PSA « en l'état », ce qui signifiait clairement qu'il était prêt à l'accepter... après quelques ajustements de détail.

Après avoir donc remué un peu d'air avec ses bras, Montebourg est redevenu, en cette rentrée, beaucoup plus docile vis-à-vis de la famille Peugeot, lors d'une interview sur BFM-TV dimanche 26 août. De faire annuler purement et simplement le « plan social », comme l'exigent les syndicats, il n'est pas question : tout juste le ministre propose-t-il de le « reformater et de le diminuer ». Mais surtout, il a appelé les syndicats « à la responsabilité économique, pour ne pas affaiblir le constructeur ». Et de poursuivre : il faut « penser à tous ceux qui restent, (...) les 100 000 salariés qui restent à Peugeot. Affaiblir Peugeot, ne pas l'aider si elle en a besoin, c'est risquer la descente aux enfers pour ceux qui restent ».

L'argument est bien connu des travailleurs de l'usine d'Aulnay, puisque c'est celui qui est rabâché par les cadres depuis le 12 juillet ! L'entreprise serait en danger de mort, et si les 8 000 travailleurs concernés n'acceptent pas de se sacrifier, ils mettent en danger « les 100 000 autres » !

Il s'agit donc d'insinuer que, tout de même, les salariés menacés devraient faire preuve d'un peu moins d'égoïsme et penser un peu aux autres - autrement dit, qu'ils devraient se passer la corde au cou eux-mêmes et se sacrifier pour sauver le reste de leurs collègues du groupe !

Cette argumentation est doublement scandaleuse. D'abord, parce qu'elle tend à faire croire que ce sont les licenciés en puissance qui seraient responsables... d'autres licenciements futurs ! Alors que les licenciements, ce sont les actionnaires et leurs commis de la direction du groupe qui en sont seuls et uniques responsables. Et ensuite, parce que le ministre prend pour argent comptant les mensonges de la direction sur la santé financière du groupe : en brandissant la menace d'une « descente aux enfers » pour les 100 000 salariés restants, Montebourg accrédite l'idée que PSA est à l'agonie, « oubliant » les ventes records de ces dernières années et les 12 milliards d'euros de « sécurité financière » dont le PDG Varin lui-même se vante bruyamment dans la presse économique.

Cerise sur le gâteau, Montebourg en a profité pour mettre en cause les propos d'un porte-parole CGT des travailleurs d'Aulnay qui avait déclaré en juillet que puisque le patron avait déclaré la guerre, les travailleurs allaient également « faire la guerre ». Pour monsieur Montebourg, le terme « faire la guerre » « ne paraît pas le bon terme ». C'est peut-être parce que monsieur Montebourg ne risque pas, lui, de devoir pointer à Pôle emploi dans 12 ou 18 mois.

Ce que voudrait le ministre - et tout le gouvernement avec lui, en accord avec le patronat - c'est que le dossier PSA se referme au plus vite, qu'il y ait quelques négociations, que PSA recule sur quelques centaines de licenciements, et que l'usine d'Aulnay ferme sans bruit. Et la seule chose qu'ils craignent, c'est l'intervention directe des travailleurs concernés dans ce ronron. D'ailleurs, à aucun moment Montebourg ne s'est adressé aux travailleurs eux-mêmes : il ne parle qu'aux syndicats, dont il voudrait bien qu'ils jouent le rôle de pompiers de la colère ouvrière - c'est ce que veut dire le terme de « responsabilité ».

N'en déplaise à Montebourg, c'est bien une guerre qui se joue à Aulnay, à Rennes, et au-delà dans toutes les entreprises frappées par les licenciements, à PSA et ailleurs. Cette guerre, les patrons la mènent sans état d'âme, sans que cela dérange plus que ça les ministres socialistes. Alors, la seule façon « responsable » d'agir pour les syndicats - devant les travailleurs, car les syndicats n'ont en aucune manière à être responsables devant les ministres et les patrons - c'est d'aider les salariés à s'organiser eux-mêmes pour mener cette guerre le plus loin possible, rendre coup pour coup et gagner des batailles.

À Aulnay, la reprise du travail après quatre semaines de congés et une semaine de chômage aura lieu le mardi 4 septembre. Dès que possible, les travailleurs se réuniront pour décider des premières actions à mener pour démarrer la contre-offensive aux attaques patronales. Ils savent désormais plus que jamais qu'ils ne pourront pas compter sur le soutien du gouvernement socialiste, mais uniquement sur leurs propres forces.

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