Il faut interdire les dépassements d'honoraires18/07/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/07/une2294.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Il faut interdire les dépassements d'honoraires

Le gouvernement Ayrault se dit décidé à mettre « un terme aux dépassements d'honoraires abusifs » des médecins « d'ici à la fin de 2012 ». Sur cette question, des négociations doivent s'ouvrir le 25 juillet entre l'Assurance maladie, les complémentaires santé et les syndicats de médecins. Les dépassements d'honoraires sont devenus une pratique courante. Leur montant est passé entre 1990 et 2010 de 900 millions d'euros à 2,5 milliards. Le quart des médecins pratiquent des dépassements d'honoraires, et 41 % des spécialistes, dont 85 % des chirurgiens et 66 % des gynécologues.

Les dépassements d'honoraires sont surtout le fait de médecins, généralistes et surtout spécialistes, travaillant dans le secteur 2 créé en 1980. Ils ont signé une convention avec la Sécurité sociale qui les autorise à fixer librement leurs tarifs, les dépassements d'honoraires restant à la charge du malade ou en partie de sa mutuelle s'il a les moyens d'en avoir une. La seule limite imposée à ces dépassements est qu'ils doivent être déterminés « avec tact et mesure, en tenant compte de la réglementation en vigueur, des actes dispensés ou de circonstances particulières ». Aujourd'hui, sans tact ni mesure, les dépassements d'honoraires ont explosé et leur montant est passé en moyenne de 25 % du tarif de la Sécurité sociale en 1990 à 56 % en 2011. Et c'est comme cela qu'un gynécologue peut demander 70 euros pour une consultation dont la Sécurité sociale ne rembourse que 15 euros.

Les dépassements d'honoraires sont aussi le fait de médecins hospitaliers qui bénéficient du « secteur privé à l'hôpital ». Sur les 45 000 médecins hospitaliers, 4 524 ont droit au « secteur privé » et 1 864 pratiquent sans retenue des dépassements d'honoraires. Le secteur privé à l'hôpital a été créé en 1958 pour attirer dans les Centres hospitalo-universitaires nouvellement créés des médecins qualifiés et renommés travaillant jusqu'alors dans des cliniques privées. Ils obtenaient le droit de consacrer 20 % de leur activité à des malades reçus en consultation privée et hospitalisés dans des lits dits privés, leur seule contrainte étant de payer une redevance à l'hôpital pour pouvoir utiliser les équipements de celui-ci et des collaborateurs, médecins, infirmiers et secrétaires. Là aussi le système a très vite explosé et des sommes exorbitantes ont été réclamées par certains professeurs. La revue 60 millions de consommateurs citait le cas d'une opération de la cataracte facturée 1 490 euros à l'Hôtel-Dieu de Paris, quand la Sécurité sociale ne rembourse que 271,70 euros.

Le gouvernement dit vouloir s'en prendre aux dépassements abusifs. L'intention est louable, mais elle risque bien de n'être suivie d'aucun effet car c'est l'ensemble du système qui permet et facilite ces dérives. C'est le principe même des dépassements d'honoraires qui doit être remis en cause, et pas seulement ceux considérés comme abusifs. Faute de quoi la santé pour tous restera un slogan creux.

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