Grande-Bretagne : De Jaguar à Vauxhall La politique nationaliste des appareils syndicaux20/06/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/06/une2290.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne : De Jaguar à Vauxhall La politique nationaliste des appareils syndicaux

Unite, le plus grand syndicat britannique et principal syndicat dans l'automobile, vient de publier un programme intitulé Au volant de la croissance, une stratégie pour l'automobile britannique, dans lequel ses dirigeants développent la politique qu'ils proposent face à la crise.

Pas question néanmoins de poser le problème de la défense des intérêts des ouvriers du secteur : c'est de ceux de l'industrie en général qu'il s'agit, c'est-à-dire des entreprises et de leurs actionnaires. Ce programme est en fait surtout consacré à donner de bons conseils au gouvernement pour aider le patronat de l'automobile, par des mesures protectionnistes. Par exemple, notant que 72 % des voitures utilisées par la police sont construites à l'étranger, Roger Maddison, responsable de l'automobile à la direction de Unite, s'insurge : « Jamais cela n'arriverait en France ou en Allemagne. » Et d'entonner le trop fameux couplet du « produisons anglais ».

Sans doute y a-t-il bien un petit passage dans ce programme où Unite dit être « opposé par principe » aux baisses de salaire et autres attaques contre les conditions de travail, qui ont touché nombre d'entreprises du secteur. Seulement il y a loin de la rhétorique aux actes.

«Efforts» et salaires en baisse

Ainsi, fin mai, le même Roger Maddison saluait l'annonce de profits et de ventes record par le groupe JLR (Jaguar-Land-Rover), citant cette entreprise en exemple à tous les constructeurs opérant en Grande-Bretagne et louant les « efforts » de ses ouvriers. Des « efforts », ça oui, et grâce à Unite qui, depuis trois ans, se joint au chantage à l'emploi de JLR pour faire avaler aux ouvriers des baisses de salaire et une aggravation de leurs conditions de travail.

En mai, ce même scénario s'est reproduit, cette fois à l'usine General Motors-Vauxhall d'Ellesmere Port, dans la région de Liverpool. Cette fois, le même Roger Maddison, au nom de Unite, a recommandé l'acceptation d'un accord qui, selon GM et Unite, garantirait le maintien en activité de l'usine avec la mise en production du nouveau modèle de la Vauxhall Astra en 2015. Faute d'autre perspective, les ouvriers de Vauxhall ont cédé au chantage en votant pour cet accord à 94 %. Mais à quel prix !

Pour tous, ce serait un gel des salaires pour deux ans, le samedi travaillé obligatoire, l'introduction d'un système dit d'« heures corridor », qui permet au patron d'embaucher et débaucher les ouvriers sans préavis et sans avoir à payer des heures majorées, le retour du travail de nuit, deux heures de plus sur la semaine de travail et, pour l'entretien, une flexibilité totale sept jours sur sept.

Quand aux nouveaux embauchés, ils ne toucheront que 70 % du salaire des ouvriers actuels faisant le même travail, rattrapable par paliers sur cinq ans (s'ils n'ont pas perdu leur emploi d'ici là) et ne bénéficieront pas de la retraite maison.

Drôle de «victoire»

Voilà ce que Unite a osé présenter comme une « victoire pour l'automobile britannique » aux ouvriers d'Ellesmere Port.

Moyennant quoi, l'usine de Bochum en Allemagne sera fermée et la production de la nouvelle Astra sera répartie entre Ellesmere Port et Gliwice, en Pologne. Le coût du travail en Grande-Bretagne est donc estimé aussi bas qu'en Pologne par les comptables de General Motors eux-mêmes, c'est tout dire ! Et Len McCluskey, leader de Unite, de saluer l'événement en pronostiquant le retour prochain en Grande-Bretagne de productions précédemment délocalisées.

Inciter les ouvriers britanniques à vendre leur force de travail à n'importe quel prix auprès des capitalistes, voilà à quoi se ramène la défense de l'industrie « nationale » des appareils syndicaux. Heureusement, ils ne sont pas toujours suivis. Les ouvriers de l'usine Jaguar de Castle Bromwich, près de Birmingham, ne viennent-ils pas d'envoyer sur les roses Roger Maddison qui leur recommandait d'accepter de travailler les samedis en échange d'une vague promesse d'un millier d'emplois supplémentaires ?

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