Tunisie - Les élections à l'Assemblée constituante : Et les revendications de la population ?27/10/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/10/une2256.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Tunisie - Les élections à l'Assemblée constituante : Et les revendications de la population ?

Les élections du 23 octobre en Tunisie ont été marquées par l'importance de la participation et le succès du parti islamiste Ennahda, qui arrive en tête de la centaine de partis politiques en lice. La presse parle d'environ 30 % des voix et de plus d'un tiers des sièges à l'Assemblée.

Se voulant rassurants vis-à-vis des grandes puissances et des investisseurs étrangers, ses dirigeants ont d'ores et déjà annoncé qu'ils étaient prêts à former une coalition avec les deux formations laïques arrivées derrière lui, le mouvement Ettakatol et le Congrès pour la République.

Dix mois après la chute de la dictature de Ben Ali, le 14 janvier, il s'agissait des premières élections libres depuis trente ans. Et beaucoup, parmi les 7 millions d'électeurs qui étaient appelés à élire les 217 membres de la future Assemblée constituante, ont voulu utiliser ce nouveau droit.

Plusieurs facteurs expliquent sans doute le succès du parti Ennahda. Contrairement à une multitude de formations et de partis récemment créés, dont les listes n'étaient parfois présentes que dans une seule circonscription, il était un des rares partis à avoir un passé d'opposant à la dictature et à avoir une implantation nationale. Quant à son positionnement sur le terrain de la religion, il lui conférait un caractère populaire. Il était également le seul à disposer de moyens financiers et d'un véritable réseau de militants pour relayer sa propagande dans la population, mais aussi pour pallier les carences de l'État en matière d'assistance aux plus démunis. Quant aux autres partis, y compris ceux qui se disaient de gauche, ils se gardaient bien de développer un programme de défense des intérêts de la population pauvre.

Or, dix mois après le départ de Ben Ali, la situation sociale n'a pas changé en Tunisie. À commencer par le chômage, qui continue même à s'amplifier, notamment dans les régions les plus pauvres du sud et de l'ouest du pays qui ont été au départ de la révolte contre Ben Ali. Comme le disait un jeune pour justifier son refus d'aller voter « Ce n'est pas ça qui nous donnera du boulot. »

Le décalage est flagrant entre ces attentes de la population et le processus électoral, qui va maintenant permettre la mise en place d'une Assemblée constituante et qui promet la « démocratie » au peuple tunisien. Quelle que soit la forme que prendra celle-ci, il est d'ores et déjà évident qu'elle offrira peut-être des postes à tout un milieu politique, en partie rénové, mais aucune solution aux problèmes pressants des couches populaires.

Depuis des mois, un peu partout dans le pays, les grèves et les manifestations de la population, déçue dans ses attentes d'une amélioration concrète de ses conditions de vie, n'ont pas cessé. Les travailleurs, la population pauvre mettent en avant leurs revendications avec les moyens à leur disposition. Trouveront-ils au cours de ces luttes les militants, les organisations qui sauront les formuler, les unifier, leur donner une perspective politique ? C'est peut-être l'enjeu de la période qui vient, mais ce n'est pas de l'Assemblée constituante qu'il faut attendre une réponse.

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