La commémoration du 17 octobre 1961 : Cinquante ans après, le silence de l'État19/10/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/10/une2255.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La commémoration du 17 octobre 1961 : Cinquante ans après, le silence de l'État

De nombreuses manifestations ont commémoré le 17 octobre 1961 et rappelé la tuerie perpétrée dans la capitale par la police de la très démocratique République française contre les travailleurs algériens venus manifester contre le couvre-feu qui leur était imposé.

Lundi 17 octobre, à Paris, des Grands Boulevards à Saint-Michel, les manifestants d'aujourd'hui ont emprunté un des itinéraires que ceux d'il y a cinquante ans auraient dû suivre s'ils n'en avaient été sauvagement empêchés. Brandies par les manifestants, les silhouettes en contre-plaqué portant le nom des victimes rappelaient les méthodes de la répression policière : « tué par balle », « mort par strangulation », « noyé », « frappé à mort »... En effet, pendant toute une nuit, c'est à une véritable chasse à l'homme, une chasse au faciès, que s'était livrée la police. Dix mille Algériens furent arrêtés et parqués dans des espaces publics transformés pour l'occasion en lieux d'internement où le carnage continua pendant plusieurs jours.

Pendant des années, au mépris des témoignages de ceux qui rapportaient l'extrême violence des coups portés, les exécutions, les corps jetés à la Seine depuis les ponts, les cadavres charriés par ses eaux, et au mépris de tous les Algériens portés disparus par leurs proches, jamais revenus à l'atelier ou au chantier, on en est resté au bilan officiel de deux morts et quelques dizaines de blessés. Et le silence s'est installé, occultant le massacre perpétré par la police sous les gouvernements de droite comme sous ceux de gauche.

Il a fallu attendre trente ans pour que des historiens, tel Jean-Luc Einaudi, après avoir rassemblé les témoignages, étudié les registres des cimetières parisiens et de l'Institut médico-légal, compulsé les archives de la Fédération de France du FLN, déchirent ce silence et que soient apportées les preuves de cette sanglante répression qui fit, au moins, deux cents morts. Mais l'État refuse encore aujourd'hui que la vérité soit faite sur ces assassinats. Sa position reste celle de Maurice Papon, que ses responsabilités dans la déportation des Juifs sous l'occupation n'empêchaient pas d'être préfet de police à l'époque, et sous les ordres de qui fut perpétré et orchestré le massacre. Il déclarait peu de temps avant le 17 octobre à des policiers parisiens réunis : « Pour un coup, nous en rendrons cent ! » Couvert par tous les responsables politiques du moment.

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